Je passe mon tour pour l'historique de Blade Runner, Philip K. Dick, et son caractère fondateur, dans l'élaboration des codes esthétiques et des thèmes du cyberpunk crasseux. Tout était posé dans le film de Scott.
On retrouve le monde presque 30 ans plus tard si mes calculs sont bons, Tyrell Corp. a été remplacée par Wallace, les Réplicants sont domestiqués et maîtrisés tandis que le spectre des androïdes rebelles plane encore.
Et là, c'est le grand vide. Je n'ai rien contre les films longs et lents mais ce choix implique un parti pris visuel radical, une atmosphère dense, des enjeux poignants.
La quête d'identité du personnage principal, réplicant autorisé, est téléphonée et caricaturale. Je ne sais pas si le beau visage morne de Gosling sert ou dessert le propos dans ce cas précis mais il échoue à communiquer ses doutes, ses brisures, la crise de n'être qu'un artefact plutôt qu'un "réel" humain. Oui, le thème de la définition et de la recherche de l'humanité est encore au cœur de tout le film, doublée pour le coup de la quête de l'ascendance, de la filiation. Du très classique, déjà fait, déjà vu et ça ne peut s'imposer comme moteur unique de l'histoire. Il n'y a pourtant pas grand chose d'autre que cette enquête un peu bêta, pleine de trous, portée par un personnage aux motivations confuses. Les indices tombent, des seconds rôles simplistes balancent leurs infos, adoptant des comportements parfois incohérents, et servent un héros qui avance mollement. Vu que ça ne décolle pas, comme dans Régression d'Amenabar, j'ai cette horrible sensation d'être enjoint par un réa lourdement pédagogue à ressentir des émotions, éprouver de la surprise sur commande, conformément aux codes de mise en scène et musicaux en vigueur.
La subtilité sourde de BR est ici balayée par la simplicité du propos, le manque de travail sur les motivations des personnages, la pauvreté du message de fond et cette volonté grossière d'appuyer lourdement les pistes et les moments clés à coups d'indices, symboles, dialogues sibyllins qui se veulent énigmatiques et profonds. Alors qu'on n'a rien de malin à se mettre sous la dent.
Techniquement, l'intrigue est bancale, mécanique, l'intervention de Harrison Ford est surexploitée, misant beaucoup trop sur l'acteur et le personnage de Deckard pour attirer la sympathie du spectateur.
Tout s'étale à l'envi et nombre de scènes basculent du mauvais côté de la dualité poétique/chiant, mystérieux/pompeux, brutal/grandguignolesque.
Tout est finalement creux et explicite. Pas de fond.
Il y a de bons côtés, comme des ambiances urbaines superbes, un design sonore excellent, des props sympa, une histoire secondaire avec l'IA de compagnie plus touchante que l'arc principal et un Dave Bautista qui est le perso le plus charismatique du film.
Mais Jared Leto qui fait des phrases bidon pour endosser le rôle du méchant illuminé de service, Robin Wright bloquée en flic alcoolique qui rappelle à qui veut l'entendre que tout cela est quand même très grave, comme si elle essayait de convaincre autant le spectateur qu'elle-même, une faction d'androïdes révolutionnaires totalement sous-exploités qui se pointent d'un coup comme des choristes de comédie musicale, Harrison Solo dont on se demande où il a garé le Faucon Millenium, des scènes qui ne savent pas se conclure... Non.
L'arnaque, quoi.
Ca fait un peu flipper pour Dune, malgré le sympa Arrival et les précédents films de Villeneuve, et ça donne envie de remater le Director's Cut de Blade Runner.

VulcaseArkolax
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le 12 oct. 2017

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Lazar Baruk

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