Comme un songe âpre et mélancolique... Entre phénix et mouton électrique

Quelle frustration que de ressortir de Blade Runner 2049 avec un goût d'inachevé en bouche, une sensation de rapidité malheureuse malgré la lenteur générale, exécution finale qui sonne faux compte tenu des deux premières heures. Car le film de Denis Villeneuve frôle le statut de monument cinématographique qu'il aurait assuré en conservant son postulat initial contemplatif tel un western futuriste et, surtout, en écartant du projet son producteur, Ridley Scott. Blade Runner nouveau cru est un compromis artistique et dramatique sans cesse rejoué entre l'humanisme de Villeneuve et le pessimisme-nihilisme de Scott, entre le grandiose esthétique de l'un et la violence figée que l'autre déploie depuis un certain temps dans ses propres métrages. Leur confrontation donne naissance à des idées intéressantes mais cinématographiquement trop hétérogènes. Cet enfant né et pourvu d'une âme, Villeneuve ; ce tyran mégalomane et misanthrope, Scott. A croire que ce dernier cherche à ternir le beauté de ses œuvres originales en les déshumanisant (cf. Alien). En résulte un film visuellement époustouflant qui prend le temps de développer une atmosphère à grands coups de décharges sonores savoureuses signées Wallfisch et Zimmer (duo ayant déjà œuvré sur Dunkerque), un film magnifique et très bien interprété mais au scénario inutilement alambiqué qui prend comme gage d'intelligence l'opacité des situations : on a l'impression que toute l’œuvre se cache dans une fausse complexité et qu'en grattant le vernis certes magnifique, on découvre une linéarité scénaristiques éculée. Un ravissement pour les yeux, un terreau qui invite à la réflexion sur les nouvelles technologies et la place de l'humain dans ce nouveau monde mais comme tuée dans l’œuf par des coupes visibles (il manque des scènes entre l'errance de Gosling et l'affrontement final) et l'impression d'un auto-sabotage ayant pour but de rappeler combien Blade Runner premier du nom était extraordinaire. Ce qui n'empêche pas de reconnaître le savoir-faire d'un réalisateur à la puissance humaniste et esthétique immense qui confère au roman de Dick une puissance cathartique folle: Denis Villeneuve.

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le 19 oct. 2018

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