Blade Ruinneur
Denis Villeneuve est un metteur en scène qu'on apprécie. Sicario, Enemy, Premier Contact... la plupart de ses œuvres sont puissantes, et on sait le bonhomme capable de mettre une beauté plastique...
le 4 oct. 2017
209 j'aime
40
La décennie actuelle, dans sa seconde moitié surtout, nous aura assommé d'une floppée de remakes, prequels et diverses suites à toutes ces franchises aujourd'hui cultes sorties autours des années 80. On continue à presser tout le jus de Termitator ou autres Aliens pourtant déjà épuisé depuis longtemps, on essaie de faire revivre un Robocop presque oublié, on relance les grosses sagas Star Trek et Wars, on re-ressuscite les dinosaures de Jurassic-Park, on remet de l'essence dans le réservoir de l'épave de ce bon vieux Max, et je n'ose parler des projets de remettre Indy sur les routes de l'aventure...
Avec tout ça, Blade Runner ne fait pas exception à la règle. Sa suite directe, Blade Runner 2049, à la différence des autres films sus-cités, a la lourde tâche de reprendre tout un univers peu commun et très détaillé initié par le premier volet, dont l'héritage sur le cinéma n'est plus à vanter aujourd'hui. Et étant donné qu'en plus de trente ans, aucun film n'a pu atteindre la beauté magistrale du premier Blade Runner, il était à prévoir que celui-ci allait forcément souffrir la comparaison avec son aîné.
Pourtant, on ne peut que constater le travail colossal effectué par Denis Villeneuve, et les moyens mis en place pour nous livrer une oeuvre qui se veut grandiose. Plutôt que de situer l'action dans un LA déjà dépeint par Ridley auparavant, Denis nous fait voyager un peu partout en Californie, nous dévoilant d'autres facettes d'un univers que l'on croyait déjà connaître. Et il n'y va pas de main morte : cadrages léchés, ambiances colorées, une jolie brume, de la pluie, de la neige, un peu de poussière, un jeu de contrastes sympathique...
Si l'ensemble est très joli, il reste cependant très froid. Le film, finalement, ne semble qu'être une succession d'artworks, des tableaux malheureusement statiques et manquant cruellement de vie. Villeneuve semble s'acharner à obtenir sa belle image, au point de parfois friser l'absurde, par exemple en faisant se garer Ryan Gosling de travers au milieu d'un parking vide pour la seule raison que le cadrage est plus sympa comme ça. Le résultat, c'est que cette recherche absolue de la bonne esthétique se fait au détriment du détail qui ajoute l'immersion dans l'univers, et qui faisait la force du premier film. Ici la pluie n'est plus aussi crédible, le jeu d'ombre et de lumière trop statique (ce qui n'arrive absolument jamais dans l'oeuvre de Scott, au passage), la foule n'est plus si oppressante, l'intérieur ne semble plus coexister avec l'extérieur, les différents lieux visités sont trop vides, c'est bien dommage...
En dehors des plans d'ensemble, le travail d'ambiance est quasi inexistant, et pourtant il est crucial pour moi : ce n'est pas du degré de réalisme d'une oeuvre que dépend sa crédibilité, mais plutôt des petits détails qui paraissent inutiles mais qui donnent une dimension humaine à tout ça. Hors ici, en dehors peut-être d'une cocotte fumante au début (sur laquelle on insiste lourdement d'ailleurs, à croire que c'est pour cacher la misère) et de deux ou trois éléments dans le film, rien ne vient vraiment nous donner l'impression que les personnages sont autre chose que des rôles dans un long métrage.
A côté, des dialogues semblent aussi artificiels que tous ces jolis décors décidément trop numériques et pas assez palpables, les personnages manquent de profondeur à l'exception du héros, l'ensemble est strictement manichéen et manque de subtilité. L'intrigue se complexifie inutilement au fur et à mesure que l'histoire avance, jusqu'à devenir ridiculement grandiloquente vers la fin sans que ça n'apporte quelque chose de vraiment intéressant. Là où son aîné se contentait de poser discrètement quelques questions sans vraiment y répondre, Blade Runner 2049 insiste explicitement, pour de pas dire un peu lourdement (oups tant pis c'est dit), sur le thème de la cohabitation entre humains et replicants, ayant le culot d'aller jusqu'à nous montrer un groupe de replicants révolutionnaires dans une scène aussi inutile que grotesque dans sa mise en scène.
Enfin, j'ai trouvé dommage de vouloir absolument relier cet opus au précédent, alors que la richesse de l'univers permettait qu'on l'exploite en y racontant une histoire totalement différente. Ceci dit, dans ce cas, on n'aurait pas eu le plaisir d'y retrouver un Harisson qui, pour mon plus grand bonheur, s'en sort très bien dans le rôle de ce Deckard vieillissant.
Si cette suite respecte dans les grandes lignes l'univers de Blade Runner et malgré ses quelques qualités, on peut se poser des question sur ce qu'elle y apporte réellement, si ce n'est cette petite multitude de paysages un peu plus variés que dans l'histoire d'origine.
Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2017
Créée
le 22 oct. 2017
Critique lue 252 fois
5 j'aime
D'autres avis sur Blade Runner 2049
Denis Villeneuve est un metteur en scène qu'on apprécie. Sicario, Enemy, Premier Contact... la plupart de ses œuvres sont puissantes, et on sait le bonhomme capable de mettre une beauté plastique...
le 4 oct. 2017
209 j'aime
40
Pourquoi Blade Runner 2049 ? Cette question se posait à l'annonce d'une suite aussi intrigante qu'inquiétante et force est de constater qu'elle se pose encore aujourd'hui. La nouvelle création de...
Par
le 5 oct. 2017
161 j'aime
32
Pour ne pas être seul, on se réfugie dans une mégalopole techno. On vit les uns sur les autres dans des cités dortoirs. Et personne ne se connaît. Et les rues sont remplies, de gens qui baissent la...
le 4 oct. 2017
154 j'aime
35
Du même critique
Je vais ici vous prouver scientifiquement que Barberousse vaut 10/10. C'est le résultat d'une étude scientifique, c'est donc irréfutable. Soient H1, H2 H3 et H4 les quatre hypothèses que nous...
le 27 mai 2013
12 j'aime
17
Du papier. Brazil, c'est avant tout un moment de franche rigolade. Terry Gilliam nous met à disposition une panoplie de gags en pagailles, si bien qu'on ne sait plus où mettre la tête. Des moments...
le 11 août 2013
12 j'aime
Avant de commencer, que l'on mette les choses bien au clair : si je ne suis pas réellement schizophrène, j'en aurai peut-être l'air par la suite, puisque je vais m’interviewer moi-même. Ce n'est...
le 29 oct. 2013
11 j'aime
21