Tolkien s'invite chez les Grimm Brothers. Une rencontre qui paie, et pour de vrai, messieurs dames.
Jadis, une sorcière maléfique s'appropria le trône en tuant le roi qu'elle avait séduite à la sortie d'une bataille farouche qu'elle avait orchestrée. Des années plus tard, elle apprend par son miroir qu'elle ne sera bientôt plus la plus belle du royaume et que cette femme encore plus belle qu'elle n'est autre que Blanche-Neige, fille du défunt roi et destinée à la défaire...
Assurément, "Blanche-Neige et le Chasseur" est la bonne surprise que je n'attendais plus. Au diable les commentaires tirant le film vers le bas en évoquant des références telles que "Legend", "Robin des Bois" ou plus explicitement "Le Seigneur des Anneaux". Car le film de Rupert Sanders a beau emprunter à ses films pour se construire, il n'y a pas de raison de lui reprocher si la chose est bien faite. Et le film vaut bien mieux que ça. Car "Blanche-Neige..." est un vrai film fantastique, une véritable oeuvre de dark fantasy comme on en avait plu vu depuis la trilogie culte de Peter Jackson su-citée. Depuis bien longtemps l'on avait pas vu un blockbuster d'une telle intelligence dans ses thèmes fétiches et d'une telle retenue quant à l'humour indissociable de ce genre de production qui pour le coup, s'est abstenu de pourrir le long-métrage. Et grand bien lui en a pris. En faisant de son film une oeuvre à l'équilibre heroic/dark fantasy remarquablement bien géré, sans jamais hésiter entre les deux styles, Rupert Sanders installe une sorte de stress de tous les instants, tout en gardant bien en vue son récit, simple mais terriblement prenant et efficace. "Blanche-Neige et le Chasseur" fait effectivement partie de ces très rares films à grand spectacle qui ne s'autorisent jamais la vanne facile, la blague potache de trop, bien que l'oeuvre soit on ne peut plus sérieuse que d'habitude. Dans ce sens, le film se présente comme le digne successeur du "Seigneur des Anneaux", un film d'une richesse visuelle impressionnante (les décors sont absolument somptueux), en parfaite harmonie avec l'esprit du film et celui du conte original, et un spectacle accessible à tous malgré tout. Et c'est cette envie sincère de se démarquer du ciné-market habituel qui finit de faire de "Blanche-Neige et le Chasseur" un film fantastique d'une noirceur bâtarde mais jamais complaisante et un spectacle complet et plus original qu'il ne peut paraître.
Avec tout ce que propose Rupert Sanders, on se fiche pas mal que le scénario paraisse un peu redondant et ne mène finalement à pas grand-chose (le gros du film décrit la marche de Blanche-Neige et le le Chasseur à travers la forêt obscure pour retrouver le camp des résistants). Le rythme, lui, s'accorde bien au récit et l'implication des acteurs est impressionnante : ainsi, Charlize Theron a beau assurer une grande partie du spectacle, s'appropriant certaines scènes pleines de désespoir et de cruauté qui font tout le sel du film, Chris Hemsworth fait entièrement oublier son personnage international de "Thor" et livre une interprétation subtile et intelligente sans tomber dans le cliché de l'homme du film. De ce point de vue, l'héroïne a beau être une femme, les deux personnages masculins majeurs du film s'avèrent plus approfondis qu'il n'y paraît et le frère de la reine complète parfaitement bien un casting déjà très bon. Et Kristen Stewart a beau jouer sur le même ton pendant plus de deux heures, son charme et sa présence sont bel et bien aussi magnétiques que celle de Charlize Theron. Ajoutez à cela un brillant casting britannique de nains, toujours là pour détendre l'atmosphère, et toujours avec justesse.
Au final, l'oeuvre s'avère imparfaite sur peu de points, mais réussit largement à convaincre pour pouvoir espérer une suite ou un tel travail similaire de la part du réalisateur au service d'un autre genre. Brillant et hypnotique.