Au sommet de leur gloire grâce aux séries de courts-métrages Mickey Mouse et Silly Symphonies, les Walt Disney Animation Studios se lancent dans un pari fou: aller au-delà des cartoons et réaliser un long-métrage d'animation à gros budget. Pari d'autant plus fou que les Studios commencent enfin à enchaîner les succès et à se débarrasser de leurs dettes. Seul Walt Disney semble être totalement optimiste à l'idée de lancer ce projet.


Le faiseur de rêves choisit le conte Blanche-Neige et les Septs Nains pour porter à l'écran le premier film du studio.
La production ne sera pas de tout repos allant jusqu'à vider les caisses de la boîte aux grandes oreilles alors que le dessin animé n'est même pas fini. Si le film se plante, c'est la mort du studio. La qualité doit être impérativement au rendez-vous.
Nous connaissons tous la suite de l'histoire, acclamation générale, records au box-office, statut de film culte etc...


Nous connaissons tous ça car Walt Disney a tout fait pour que sa version de Blanche-Neige soit la plus réussie et la plus marquante possible. Son studio aura tout fait pour que le film soit le dessin animé de chaque génération en le ressortant régulièrement au cinéma sur une période de plusieurs décennies. Il en est encore plus fascinant de voir aujourd'hui à quel point Blanche-Neige et les Septs Nains, outre son charme nostalgique, détonne des productions animées actuelles par la puissance de sa narration et de sa mi se en scène. Il ne s'agit pas d'un produit commercial sans âme mais d'une pure oeuvre d'art, du vrai cinéma.


Dès la scène d'introduction, le spectateur constate que Walt Disney compense son manque de moyens (entre guillemets, le film est à la pointe de la technologie mais ne peut pas encore tout se permettre) par un système de narration très intelligent. Chaque question que le récit laisse améliore l'ambiance du film. Par exemple, pourquoi ne voit-on personne dans tout le château à part la Reine et Blanche-Neige? On l'ignore mais on ne reproche pas ce manque car cela rend la présence de la souveraine encore plus terrifiante. En ayant l'impression que le château est quasi-vide, on craint d'avantage ce qui peut arriver à l'héroïne sans défense dans une forteresse aussi grande. Et cela aide à rendre l'arrivée du prince plus rassurante. On peut appliquer cette analyse sur le Royaume tout entier. Les personnages vus sont tous les principaux, il n'y a aucun figurant. On ne voit que le Château de la Reine et la Forêt où se trouve la Chaumière des Septs Nains. Ces derniers sursautent rien qu'en entendant le nom de la souveraine, pour quelle raison? Comment savent-ils qu'elle pratique la sorcellerie? Aucune réponse et cela est encore un avantage pour installer la tension.


La meilleure exploitation de cette narration est atteinte avec la transformation de la reine en sorcière. Outre la musique glaçante a souhait, la mise en scène digne d'un film d'horreur, l'une des raisons pour lesquelles le spectateur tremble autant est la souffrance de la reine. Cette figure qui semblait si puissante devient alors vulnérable et cela surprend. On a presque mal pour le personnage en question. Blanche-Neige et les Sept Nains sait comment émouvoir le spectateur, il met en action des personnages simples mais qui, pris dans un univers aussi spécial, arrivent à nous faire ressentir toutes les émotions, allant du rire aux larmes.


Mais plus important encore, Blanche-Neige et les Sept Nains est un film très éducatif. Sachant que son film deviendrait LE premier film vu de toute une génération d'enfants, Walt Disney accorde beaucoup d'importance aux tâches ménagères, à la tenue ou aux comportements. On passe presque une demi-heure dans la chaumière des nains sans qu'il n'y ait de grosse péripétie. Cette partie ne contient que deux choses: le nettoyage complet de la petite maison et l'"apprentissage" des nains. Et pourtant, cela ne dérange à aucun moment car le temps donné à ce deuxième tiers est essentiel pour développer la relation entre la princesses et ses "logeurs". Et le film parvient à rendre le travail divertissant et amusant, il est aidé par un humour très efficace qui n'a pas vieilli d'un poil, de personnages très attachants (humains comme animaux), d'une animation toujours aussi magnifique et surtout d'une musique absolument incroyable. Les meilleurs compositeurs du studio s'y sont collés et cela résulte en une bande-originale exceptionnelle.


Ces éléments (et je ne les ai pas tous cité) font de Blanche-Neige et les Sept Nains le chef-d'oeuvre reconnu par tous qu'il a été à sa sortie et qu'il est encore plus aujourd'hui. Un film indémodable, intemporel et indispensable.

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le 9 mars 2016

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Walter-Mouse

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