Sang intérêt

La nuit suivant mon visionnage de Bloodshot (ma première séance ciné depuis la fin du dé-confinement, youpi), j'ai fait cet étrange rêve, ou peut-être que je l'ai imaginé. Peu importe. Tout ce que je sais, c'est que j'interviewais l'équipe du film, à savoir les scénaristes Jeff Wadlow et Eric Heisserer ainsi que le réalisateur Dave Wilson. Et je n'ai pas été déçu.

Bonjour messieur ! Je tiens tout d'abord à vous féliciter pour avoir produit un film aussi générique, prévisible et pathétique.
JW, EH, DW: Merci beaucoup ! On s'est vraiment donné à fond pour arriver à un résultat pareil.

Il est vrai que faire un film n'est pas simple. Surtout un bon film. Est-ce qu'avec ce premier film d'une franchise, qui n'existera probablement jamais, vous vouliez présenter un tout nouveau héros badass et inconnu du public ?
DW: Absolument pas. On voulait simplement imiter Marvel et DC. Mais c'était de base assez compliqué à faire car Bloodbot... Bloodrot... Bloodspot ? Bon peu importe, le gars avec le rond rouge sur le thorax. Personne ne le connaissait vraiment. C'est pour ça qu'on a engagé Vin. Une valeur sûr. C'est un gaillard qui a tellement de charisme et de talent qu'on ne pouvait pas se permettre de le teindre en drapeau japonais. C'est débile. Qui aurait voulu voir ce look ridicule dans le film ? Vin se suffit à lui-même. C'est ça qui m'a le plus plu avec projet.

Effectivement, Vin porte le film, et plutôt mal. Cherchiez-vous aussi à capitaliser sur le succès de Fast&Furious ?
DW: Prenez une des affiches du film et voyez par vous-même. La promo ne s'est basé que sur ça. Encore heureux ! Moi qui ai fait plein de références à ces chefs-d'oeuvres que sont les Fast&Furious !

Jeff, vous avez coécrit le film. Comment vous est venu l'idée de ce scénario archi-cliché ?
JW: En fait, l'idée est venu d'un concept tout simple. J'avais imaginé, juste pour déconner, une scène où Toby Kebbell danse en pantoufles-chaussettes vêtu d'un manteau blanc dans une chambre froide d'abattoir, le tout sur un fond de musique épic. Je me suis ensuite dit qu'il y avait moyen de faire un long-métrage avec ça. Et j'ai présenté l'idée à Eric
EH: Oui, il est venu tout me balancer dans le bureau, et j'ai adoré ! Mais pour rendre le tout encore plus cool, j'ai suggéré à Jeff de rajouter un pistolet d'abattage, comme celui du type à la coiffure chelou dans ce film vraiment pas connu. Comment il s'appelait déjà ? No old man for country ?

C'est vraiment une idée de merde que vous avez eu là. Comment est venu le reste du film ?
JW: Je dois dire qu'on était rapidement face à un problème. C'est bien beau de voir Toby Kebbell danser dans un frigo géant, mais pas suffisant pour faire un film. Sony nous a alors contacté pour nous demander si on ne voulait pas écrire un film de super-héros. On a bien sûr dit oui. On s'est ensuite réuni avec Eric et on a dressé une liste des choses les plus clichées dans un film de super-héros : héros badass, femmes sexy, geek sans ami, technologie sans queue ni tête, plot twist prévisible, action, etc. Et on a écrit le scénario à partir de ça. Après tout, qu'est-ce que les gens peuvent bien attendre d'un film de super-héros à part ça ? De la réflexion ? Du réalisme ? Ridicule !

Le scénario est outrageusement prévisible et l'écriture poisseuse. Mais ce qui choque le plus, c'est les personnages.
EH: Effectivement, c'est là la plus grande réussite du film. On fait en sorte que chaque personnage ait un arc et soit bien développé. Regardez le personnage de Guy Pearce par exemple. Au début, c'est juste un méchant cliché qui manipule le héros. Mais à la fin, on se rend compte qu'il est bien plus car il peut aussi passer aux armes en utilisant un lance-grenade. Ou encore le personnage d'Eiza Gonzalez. Au début, elle est mystérieuse et gentille, et à la fin elle est juste gentille. Incroyable non ?
JW: Mais de loin notre plus grande fierté c'est l'homme de main principal : Jimmy Dalton. On voulait faire de lui le plus méchant des méchants. Mais comme les jambes robotiques ça suffisait pas, on l'a écrit comme un grand mâcheur de chewing-gum qu'il colle ensuite partout. J'en ai des frissons rien que d'y penser !

Jimmy Dalton est effectivement le personnage le plus cool du film, mais que d'aspect, surtout avec son armure de combat à la fin du film. Mais j'ai quelques doutes par rapport à son rôle dans l'intrigue. C'est quand même lui qui balance le plot twist au personnage principal sans aucune raison, comme s'il s'adressait aux spectateurs. je veux dire, les spectateurs sont pas cons. La subtilité c'était en option ?

JW: La quoi ?

Dave, c'est votre premier film en tant que réalisateur. Quelle était votre vision de départ ?
DW: Des scènes de combats épileptiques et des champs-contre-champs trop proches et ininventifs.

Vous venez du domaine du jeu vidéo. Cela se sent avec l'aspect futuriste, clairement volé à Neil Blomkamp, et les scènes de combat. Les chorégraphies sont plutôt impressionnantes et sont le meilleur point du film. Par contre, une bonne partie d'entre elles sont incompréhensibles. Que s'est-il passé ?
DW: Le caméraman principal avait des rhumatismes. Il tremblait tout le temps le pauvre. Heureusement il va bien mieux maintenant.

Non mais plus sérieusement: la course-poursuite dans la banlieue londonienne, elle est dégueulasse. Illisible.
JW: Pourquoi parlez-vous de d'illisibilité ? On parle d'un film là, pas d'un document Word.

Ah vous je vous avais pas sonné ! Je m'adressais au réalisateur !
JW: Pourquoi rejeter la faute sur lui ? C'est son premier film. Répartissez les fautes plutôt que de vous en prendre aux plus faibles !

Vous voulez qu'on répartisse ? Très bien Jeff ! Expliquez-moi alors pourquoi cette entreprise qui produit des nanites régénérant le corps humain est incapable de produire d'autres technologies révolutionnaires ? On a quoi à la place ? Un respirateur au-dessus des nichons, un harnais avec des webcam et des gambettis en métal !
JW: Bah ! Qu'est-ce que les spectateurs y connaissent en technologie de toute façon ? Vous vouliez quoi en plus ? Ah vous savez quoi ? Dans une première version du script, on avait même prévu d'introduire la reconnaissance facile et les lasers. On fait moins le malin maintenant, hein ?

Mais ça existe déjà bordel ! Vous écrivez où vos scripts ? Dans une caverne au fin fond du trou du cul de Tautavel ?
EH: C'est marrant, j'y ai prévu des vacances. Les Pyrénées m'ont toujours fascinées.

La ferme ! Et puis c'est quoi cette fin de merde ? Vous pouviez pas faire mieux ? Vraiment ? Et pourquoi Bloodshot n'a jamais le look qu'il a sur les affiche ? Moi j'ai payé pour ça, un look badass ! Pas Monsieur Propre en marcel !

DW: Tiens, c'est marrant que vous parliez de costumes. Je voulais justement avoir votre avis à tous sur les accoutrements d'Eiza Gonzalez dans le film.
JW: Ah ! Plus sexy tu meurs ! Parfaitement en adéquation avec un personnage travaillant dans des laboratoires !
EH: Oh oui ! Et ces plans de dos où on voit sa belle épiderme au travers du vêtement !

Vous savez quoi ? Vous m'avez saoulé. J'en peux plus. Le studio, les scénarises, le réalisateurs, les acteurs, vous avez tous ruiné ce film. On avait un concept de base prometteur et vous l'avez transformé en un film de super-héros cliché et merdique que tout le monde aura oublié d'ici un an. Et c'est pas quelques scènes d'action sympathiques qui le sauveront ! Je ne vous félicite vraiment pas ! Vous avez gâché tout le potentiel des comics Valiant pour le cinéma ! Bravo !
JW: Vous nous parliez ?
DW: C'est quoi Variant ?
EH: Aaaaah ! Eiza Gonzalez...

C'est bon, j'ai compris: j'me tire !

Plutôt étrange comme rêve... ou c'est plutôt mon imagination... Peu importe, avec un film pareil, inutile de se faire un... sang d'encre !