Cinéma et musique se sont très souvent réunis pour nous offrir des biopics plus ou moins bons: Les Beatles, Les Doors, Edith Piaf, Gainsbourg, Ray Charles, les exemples sont nombreux et la qualité oscillante. Chose sure et même très étonnante, QUEEN (groupe aimé par toutes les générations) avait réussi à passer à travers les mailles du filet jusqu’à l’annonce du Bohemian Rhapsody de Brian Singer. Dire que j’attendais ce film de pied ferme serait un doux euphémisme et quelle fut ma surprise de le voir se faire descendre par bon nombre de critiques... Chef-d’oeuvre absolu du genre? Sombre navet surestimé? Je vais tenter de percer le mystère!
Un des principaux reproches fait au film reste sa présentation quasi express de la carrière du groupe qui passe très vite sur leurs débuts et surtout sur la difficulté qu’a été la promotion de leur chef d’oeuvre orchestral “Bohemian Rhapsody”. Il est vrai qu’un film ciblé sur une période bien précise aurait été tout aussi voire d’avantage intéressant pour le développement des personnages et une dramaturgie solide. Cependant, je pense que le but du film n’est pas de s’attacher à un moment de vie du groupe mais plutôt de montrer l’évolution de leur relation et ainsi réhabiliter les autres membres. En effet, nous entendons très et trop souvent “Si tu enlèves Freddie Mercury de Queen le groupe n’est rien” mais le film nous montre tout le contraire. Le groupe a été la réelle famille que n’a jamais eu Mercury à cause de la relation très compliqué avec ses parents et ceci se voit parfaitement dans la colorimétrie du film. Dans les scènes où ils sont rassemblés, le jaune et d’autres couleurs chaudes dominent montrant le bien-être du chanteur. En revanche, lors de la grosse période noire de Freddie, loin de son groupe/famille, toute l’image se ternit et la photographie s’assombrit considérablement. De plus, il apparait comme un enfant perdu lorsque Mary le retrouve en Allemagne en position foetale sur son canapé. Un éternel enfant qui n’a plus ses proches pour le maintenir à flot.
Un des gros points positifs du long-métrage reste son ambiance visuelle et ses costumes. Pendant tout le film le spectateur voyage dans le temps et se croirait en plein 70’s/80’s tant sur les habits que dans les moeurs. On y suit la pleine ascension de Queen à travers les tenues extravagantes et hautes en couleur de leur chanteur phare qui est LE membre sûr de lui. Nous le voyons très bien dans son attitude, ses manières et son discours: il sait ce que vaut son groupe et n’hésitera pas à tout faire pour les amener aux sommets. De nombreux spectateurs déplorent l’absence de développement des principaux démons du chanteur mais je trouve que Bohemian Rhapsody arrive à nous les montrer de manière subtile. Sa famille ne comprenait pas pourquoi il “reniait” ses origines en changeant son nom d’origine (Farrock Bulsara) en Freddie Mercury. Or ce n’est pas par honte mais pour renforcer son coté showman. Ceci se voit notamment lorsqu’il insiste sur les “Bismillah” de Bohemian Rhapsody devant le producteur ignorant de chez EMI.
Pour ce qui est de ses problèmes d’alcool, le film insiste suffisamment dessus et ne tombe pas dans le pathos avec sa toxicomanie (un simple plan sur un rail de cocaïne suffit pour nous faire comprendre son addiction). Cependant, je me dois de regretter le manque d’approfondissement sur sa période noire et la fréquentation excessive de clubs gays. Le film nous le suggère sur un enchainement de plans avec “Another One Bites the Dust” en fond sonore mais j’aurai préféré une plongée dans cet environnement à la manière du Cruising de William Friedkin. Après le film se voulait tout public et je peux comprendre que de telles scènes l’auraient fait basculer en -12 voire -16 mais une approche un peu plus sombre aurait été judicieuse.
Bien malheureusement, l’un des meilleurs chanteurs de Rock est atteint du V.I.H, virus qui le tuera en 1991. Et c’est là que Bohemian Rhapsody nous prend aux tripes, où la surcharge émotionnelle atteint son apogée. Je redoutais ce passage par peur que le film tombe dans le tire larme facile mais c’est tout le contraire!
Au lieu de nous bassiner avec les explications du médecin qui livre le diagnostic, Brian Singer opte pour la métaphore musicale avec “Who Wants To Live Forever” et un éclairage zénithal pouvant faire penser au paradis. Il en est de même lors de la révélation aux autres membres du groupe qui restent sans voix mais ne tombent pas en sanglots. Nous sentons leur peine dans les jeux de regard et une certaine forme de naïveté avec un “t’as attrapé quoi?” lorsque Freddie parle du Sida. Ils intériorisent pour tout donner sur scène à en péter la voute céleste et ce au plus grand concert jamais organisé: Le Live Aid! C’est bel et bien LA scène emblématique du film, celle qui a demandé un travail monstrueux aux équipes techniques qui ont filmé en temps réel avec des caméras multiples mais aussi et surtout à Rami Maleck qui s’approprie Freddie Mercury pour le ressusciter durant 20 minutes. L’émotion est là, les frissons s’emparent de notre corps et les larmes coulent. L’impression d’être à ce concert et surtout de revoir cet immense artiste. Le seul défaut de cette séquence reste qu’ils n’ont pas reproduit l’intégralité du concert, passant sous silence “We Will Rock You” et “Is this the World We Created...?”.
Bohemian Rhapsody a des défauts, c’est sur et certain, mais il ne mérite en aucun cas le bashing qu’il a subi sur les réseaux sociaux! Il aurait été préférable d’axer le film sur une période bien précise, soit! Les débuts du groupe et les négociations pour la musique qui donne son nom au film sont trop expédiés, il est vrai. La prothèse de dents de Rami Maleck est peut-être un peu trop exagérée, je vous l’accorde. Mais très honnêtement, écouter du Queen au cinéma et ressentir les émotions qu’il m’a procuré ne me fait qu’apprécier ce film. Les fans du groupe auront le plaisir d’écouter leurs plus grands hits et les novices verront un aperçu général de leur carrière. Pas un chef-d’oeuvre mais TRÈS loin du navet que beaucoup de personnes nous vendent.

Et surtout n’oubliez pas: THE SHOW MUST GO ON!

Matcinéphile
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le 25 nov. 2018

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