Annoncé depuis une bonne dizaine d'années, retardé pour cause de divergences artistiques entre les producteurs et le groupe "Queen" lui-même, le fameux biopic sur Freddie Mercury, leader et chanteur mythique du fameux quatuor anglais, voit enfin le jour après une bonne grosse série de galère en tous genres : remplacement de Bryan Singer à la réalisation par Dexter Fletcher pour cause de désinvolture et de mésentente avec l'acteur principal, désistement de Sacha Baron Cohen (au départ fortement pressenti pour jouer Mercury) au profil du plus jeune Rami Malek (découvert dans la série "Mr Robot"), retards de tournage, et on en passe et des meilleurs.


Bref, venons-en maintenant au film en lui-même qui, depuis sa sortie, n'en finit pas de diviser avec, d'une part, une critique presse assez rude et, d'autre part, un assez bon accueil public.
De manière générale, il y a à la fois à boire et à manger dans ce biopic (trop) passionné sur Freddie Mercury. Sur ce point-là, à ceux qui n'auraient pas encore vu le film (ce n'est pas un SPOILER, rassurez-vous), "Bohemian Rhapsody" est très clairement un film SUR Mercury et non pas SUR "Queen". Cela se traduit d'ailleurs à l'écran par le fait que les quelques coups de grâce du groupe, telle que la naissance du fameux morceau "Bohemian Rhapsody", soient trop vite expédiés et assez peu développés; le film choisissant de se focaliser quasi exclusivement sur la personnalité complexe et torturé de son chanteur/leader. Sur ce plan-là aussi, à force de jouer la carte de la fascination absolue (nombreux "gros plans" et "plans rapprochés" sur le visage, ou sur le corps entier, de face ou de dos, de Mercury), le film finit par se perdre un peu et à en oublier toute forme d'objectivité. Alors oui, c'était un génie talentueux, un homme très charismatique qui a réussit s'imposer malgré les obstacles et qui savait se défendre, mais c'était aussi visiblement quelqu'un d'assez ambigu, parfois très condescendant, voir même franchement détestable envers ses proches et collègues et à l'ego fortement dominant. Malgré ce qui a été reproché par la critique, le film s'attarde (de façon minime mais visible quand même) sur ces quelques soucis, y compris sur ses problèmes de drogue et de boisson.
D'un autre côté, le fait que ce biopic se focalise essentiellement sur le talent et le génie de son héros n'est pas non plus un mal en soi dans la mesure où, il faut bien le dire, les quelques grands moments de sa vie qui nous sont donnés à voir à l'écran sont fascinants. A commencer, évidemment, par le fameux concert "Live Aid" organisé en 1985 pour venir en aide financièrement à l'Ethiopie (événement auquel ont participé de nombreux artistes mythiques tels que David Bowie, Elton John, Madonna, Mick Jagger, Paul McCartney et, évidemment, "Queen"), très grand moment de cinéma s'il en est. Etalé sur 20 minutes, clôturant le film en beauté, le "Live Aid" nous donne à voir toute l'énergie retrouvée d'un Freddie Mercury plus apaisé, sortit de ses démons. Optant pour de longs et beaux "pano-travellings" ayant pour but de bien symboliser le profond attachement entre le chanteur et son public, des "plans serrés" sur Mercury occupé à donner le meilleur de lui -même (chanter, danser sur scène) ou encore des "plans larges" dévoilant la foule en délire, la mise en scène du "Live Aid" est un pur moment de magie. On pourrait même dire que c'est à partir de là que le film trouve vraiment son envol.


A mentionner également, la très belle interprétation de Rami Malek, dans le rôle-phare de Freddie Mercury. Littéralement habité par son personnage, capable de passer de l'énergie la plus folle à la déprime la plus noire, le comédien retranscrit de manière très juste, en étant sobre et naturelle, tous les états d'âme de chanteur, le rendant tour à tour fascinant et infecte. Quant à savoir si cette prestation le mènera tout droit aux prochains Oscar, ça, c'est une autre histoire.
Outre Rami Malek, on peut aussi citer le revenant Mike Myers, dont les quelques brèves apparition dans la peau du producteur Ray Foster, viennent nous rappeler le goût et le talent de l'acteur à jouer des personnages exubérants.


Au final, si "Bohemian Rhapsody" s'avère être un film plutôt inégal (étapes de la vie du chanteur un peu trop survolées, trop forte tendance à le magnifier), il n'en reste pas moins intéressant de par son transcendant et magnifique final de 20 minutes, la fabuleuse interprétation de Rami Malek et par le plaisir communicatif que l'on prend à réécouter les quelques grands classiques de ce groupe mythique qu'était "Queen".

Créée

le 25 nov. 2018

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