Parfois, des forces deviennent des faiblesses. C'est le cas lorsqu'un monde créé ne tient debout que par ce qui lui manque. Ainsi, le film qui mise tout sur son réalisme, risque d'être jugé au regard de celui-ci : son absence d'authencité. C'est le cas de Bohemian Rhapsody qui peut faire la joie des fanatiques, mais qui, à vouloir entrer dans une exactitude formelle se perd tout seul en conjectures.


Il y a du "document" dans ce film, chaque personnage est parfaitement dessiné, chaque décors est minutieusement restitué, le récit est comme une grappe de petites scènes documentaires. Si bien que certaines erreurs de montage semblent être faites pour renforcer cet effet de réalisme.


Le soucis est qu'on a du mal à produire de grand effets avec de petites bouts d'histoire sans structure fictionnelle. Entrer dans la vie de Queen, avant d'entrer dans un film de cinéma, c'est peut être l'erreur originelle de cette aventure. Car l'approche elliptique ne permettant pas le tour du sujet, et on est d'ailleurs en droit de se demander si sujet il y a.


Le bon jeu de Rami Malek, sa distance, son incapacité à exprimer ses émotions, fonctionnerait bien si l'image rendait compte de la folie du personnage. Freddie existe dans ce film, mais le film passe à côté de lui. Sensation étrange de voir de bons acteurs ne jamais emballer l'expérience par faute d'ambition narrative. Les experts, s'ils existent, pourraient même reprocher un trop grand respect à cette statue de cire. En effet, l'habile fatuité du chanteur de Queen, l'intelligence de ses comportements insupportables est parfois confondu avec une forme d'inconstance. Une conséquence étonnante est que ses bonnes idées paraissent comme des "coups de génie" car ils semblent ne venir de nul part, comme cette intuition d'opéra-rock qui a pourtant une longue histoire.


En face d'une oeuvre technique dans laquelle on regarde d'abord la "véracité" d'une copie ou d'un re-master. Comme dans un spectacle transformiste, on ne s'attache bientôt qu'à ce qui cloche tant l'envie de reconstitution est présente. Malgré un jeu d'acteur fouillé, il ne suffit pas à dépasser l'impression d'être au musée Grévin. Du film biopic, on dérape dans le film sosie.

Critique_noir
5
Écrit par

Créée

le 2 mai 2019

Critique lue 130 fois

2 j'aime

Critique lue 130 fois

2

D'autres avis sur Bohemian Rhapsody

Bohemian Rhapsody
Sergent_Pepper
3

We will mock you

J’aime bien la musique de Queen. Pendant un temps, ce fut rangé dans la catégorie Guilty Pleasure, en souvenir de mon adolescence, durant laquelle j’ai usé jusqu’à la corde mes Greatest Hits Vol. 1...

le 25 janv. 2019

187 j'aime

20

Bohemian Rhapsody
guyness
3

A kind of tragic

Le problème d'un biopic est que soit il est mauvais et il n'a aucun intérêt, soit il est bon et il risque de remplacer la vie réelle de l'artiste par une légende hollywoodienne dans l'imaginaire...

le 24 janv. 2019

137 j'aime

49

Bohemian Rhapsody
Vladimir_Delmotte
3

Un agréable moment de poudre aux yeux

Projet au développement difficile (environ 10 ans tout de même), "Bohemian Rhapsody" est un film destiné à déchaîner les passions. Au départ prévu avec Sacha Baron Cohen dans le rôle-titre (et avec...

le 14 nov. 2018

103 j'aime

19

Du même critique

L'An 01
Critique_noir
7

Un film mal fichu que l'on n'a pas le droit de manquer

L'An 01 n'est sans doute pas un film parfait, il est même bourré de défauts et traversé d'un parti pris qui ne laisse pas la place au doute. Alors évidemment, on peut, 40 ans après, faire la liste...

le 4 janv. 2013

9 j'aime

4

Ainsi soient-ils
Critique_noir
6

Tout se passe comme s'il s'agissait d'une série de qualité, mais...

On peut sans peine être touché par l'effort produit dans cette série retraçant la vie des séminaristes des Capucins. La photo est sensible, la musique est en affordance (bien que défigurant le...

le 15 oct. 2012

8 j'aime