Pour les mêmes raisons que vous n'aimez pas...

Tout d'abord je dois avouer que je connaissais très peu Queen et encore moins la vie de Freddy Mercury. Si vaguement j'aimais bien leur musique ça n'a jamais été une passion pour moi. Et ma connaissance de la vie de ses membres était quasiment inexistante (bon j'avais dù vaguement noter que Mercury était gay et mort du sida, mais j'ignorais tout de son origine parsi par exemple, et je n'aurais même pas su dire si lui et ses comparses étaient anglais ou américains, alors les détails de leur rencontre, de la genèse de leurs morceaux, la "légende noire" de Freddy, son tempérament, ses albums solos ratés, ou autre, autant dire que je n'en avais jamais entendu parler)...

Donc forcement, dans la mesure où tout ce que raconte le film était nouveau pour moi, la question de sa (non) fidélité en tant que biopic de Freddy Mercury, qui hérisse visiblement tant de critiques, m'importe peu. D'ailleurs à y réfléchir je suis plutôt heureux que ce ne soit pas un bon biopic de Freddy Mercury rentrant dans les détails que d'autres auraient souhaité y trouver, puisque ça en fait certainement un meilleur film sur un groupe de rock.

Perso un truc m'a toujours marqué dans la légende du rock, c'est la manière dont ces aventures collectives et rencontres que sont les groupes sont toujours résumés au génie d'un seul, typiquement du chanteur, comme on va pas se compliquer la vie à examiner la contribution des simples musiciens. En terme de biopic ça donne des films comme The Doors, qui osent prendre le nom d'un groupe pour ne finalement parler que d'un de ses membres (et même pas de Ray Mansazek dont l'orgue psychédélique faisait toute l'originalité de sa musique, quand des pochards scandant des paroles incohérentes par contre il y en avait plein d'autres en ces temps - pas taper les fans de Jim, je plaisante, sa contribution aussi a participé au génie du groupe).

Enfin donc il y a cette obsession de la critique musicale (et des fans de la catégorie groupie tout à leurs fantaisies sexuelles) à se refuser d'attribuer au collectif le mérite d'une œuvre, et inventer une star à laquelle un groupe devrait tout à la place (c'est particulièrement amusant dans un cas comme les Rolling Stone, où le Génie désigné était parti pour être Brian Jones avant que, faute de lui, il devienne Mick Jagger).

Invention de génie qui profite au show biz, qui ensuite poussera la star à se lancer dans une carrière solo ou des caprices divers, donnant aux producteurs et aux sangsues de l'entourage plus d'emprise, le tout finissant généralement en des trucs musicalement médiocres, comme la carrière de McCartney post Beatles en témoigne (d'où il fut décidé que le vraie génie c'était John, qui n'eut pas le temps de sombrer autant).

Ce qui me ramène à Bohemian Rhapsody qui parle exactement de ça. D'un groupe excellent pour créer des choses ensemble, de vraies éponges qui transforment toute source d'inspiration en tube, et débarquent chacun à un moment ou un autre avec des fulgurances.
Puis d'un chanteur que la presse décide à un certain stade, et en s'appuyant sur le fait qu'il est différent, gay, à forte personnalité, etc... d'élever au rang de seul élément intéressant du groupe, ce qu'un proche intéressé exploite. Suite à quoi le chanteur se laisse tenter, abandonne son groupe pour se lancer dans une carrière solo et se plante (ici sombrant dans la débauche plutôt que le commercial -enfin on sait pas trop vu que le film ne s'attarde pas sur ses chansons de la période- mais le résultat est le même), avant de revenir dans sa famille, Queen, et de retrouver la joie de la musique (désolé du spoiler).

Une jolie petite fable qui n'est peut être pas la vraie histoire de Freddy Mercury ou de Queen (qui en fait ne s'est jamais vraiment dispersé), mais donne à ce biopic un coté méta appréciable tant ça devrait être la manière de raconter l'histoire de dizaines d'autres formations musicales victimes de ce même mécanisme du star-system, et que c'est une bonne critique d'autres biopic musicaux qui eux cèdent tout à fait à la célébration du mythe du surhomme.

Enfin donc non seulement j'ai bien aimé le film, qui s'il est de facture classique est très bien interprété et exploite fabuleusement bien la musique de Queen, mais en plus j'ai même aimé l'histoire "mensongère" que tout le monde déteste.

Antonio-Palumbof
7

Créée

le 22 sept. 2019

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