Gloire et déchéance d'une star porno

De 1977 à 83, dans une ambiance libertaire encore épargnée du sida et du mercantilisme dévastateur de l’industrie de la cassette vidéo adulte, un réalisateur de films érotiques repère un grand ado exceptionnellement bien monté, dont la carrière le propulsera très vite au rang de star nationale du porno. La première partie relate l’ascension fulgurante d’une célébrité d'un jour, bientôt suivie de son inévitable déchéance, programmée par ces règles de superficialité triomphante et de course au spectaculaire transitoire. Sous le ton d’un vaudeville glauque et désinvolte, valsant avec les puissances de l’argent, du sexe et de la drogue, ce film est un pamphlet sur la dangereuse inconscience de l’école de l’illusion éphémère, filmée depuis les coulisses coïtales insolites et banalisées d’un certain cinéma, avec la finesse de ne jamais montrer la moindre scène de cul. L’intérêt se focalise dans le syndrome de la star, dans le feu d’une ascension insolente autant que dans la menace de la disjonction identitaire par narcissisme mégalomane.
A mes yeux le personnage le plus paradoxal, c’est l’attachant réalisateur blasé (Burt Reynolds) qui conserve malgré tout l’âme d’un cinéma poétique, tournoyant autour de ce grand gamin doué (Mark Wahlberg) dont l’immaturité ne lui permet pas de voir venir la perversion du succès facile, l’altération toxicomane, l’artifice financier et la duperie d’un trône illusoire. A l’instar de ces jeunes filles exploitées le temps de l’éclat passager de leur beauté, et reléguées dans le caniveau d’où elles proviennent une fois épuisée leur moment de gloire et de séduction, ce destin masculin se mêle à d’autres portraits tout aussi touchants. Car ce drame psychologique de 1997 s’enrichit des aventures d’autres acteurs déçus ou périmés, et de celui de l’épouse du réalisateur, incarnés par une flopée d’authentiques vedettes (Don Cheadle, Luiz Guzman, Alfred Molina, Julianne Moore, Philipp Seymour Hoffman, Thomas Jane, William H. Macy, John Reilly…), toujours très sympas à revoir, surtout avec leur look d’il y a 20 ans.
etiosoko
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films avec Julianne Moore

Créée

le 25 déc. 2018

Critique lue 287 fois

4 j'aime

etiosoko

Écrit par

Critique lue 287 fois

4

D'autres avis sur Boogie Nights

Boogie Nights
New_Born
8

"I'm Dirk Diggler. I'm the star. It's my big dick and I say when we roll."

En guise de préambule, je tiens à préciser que je suis un fan inconditionnel de Paul Thomas Anderson, que Magnolia est mon film préféré, et donc, si je manque de discernement lorsque je parle de lui,...

le 3 janv. 2013

68 j'aime

8

Boogie Nights
Sergent_Pepper
7

Retiens les nuits

Boogie Nights est le film de l’envol pour Paul Thomas Anderson : passée la case du premier film, petite copie proprette, il est désormais temps d’affirmer sa singularité. Il est intéressant de voir...

le 28 sept. 2016

58 j'aime

Boogie Nights
Truman-
9

Mmmm you touch my tralalala

Boogie Nights ? Mouais au vu de l'affiche on dirait un film de danse sur de la musique disco, il manque juste John Travolta quoi ! Et bien non ce n'est pas un film de disco mais une descente aux...

le 18 déc. 2013

37 j'aime

Du même critique

Jungle
etiosoko
8

Un miraculé de l'Amazonie

Après 3 ans de service militaire israélien, Yossi Ghinsberg joue le touriste aventurier en Amérique du Sud, en sympathique amateur d’explorations originales et de pachanol, avant de se laisser...

le 26 nov. 2017

31 j'aime

4

Aquaman
etiosoko
4

Epitaphe super-héroïque

Chez Marvel, okay, j’avais pigé que c’était devenu de la pétarade non-stop et du dessin animé, mais là, mince, oh non, voilà que les super-héros de chez DC sombrent à leur tour dans les...

le 18 févr. 2019

30 j'aime

7

Premier Contact
etiosoko
8

Notre langage induit notre conceptualisation

Douze gigantesques vaisseaux spatiaux extra-terrestres stationnent chacun en un point précis de la Terre depuis plusieurs jours. Armées, politiques, philosophies, religions, sociétés, économies, sont...

le 1 mars 2017

30 j'aime

7