En dépit d'un concept novateur, Boyhood échoue à nous placer véritablement aux côtés des protagonistes. Plutôt reportage que film, notre position par rapport à Mason est impersonnelle, froide et distante. Nous tentons de le comprendre à travers le regard que les autres ont sur lui, sans vraiment réussir à le sonder. Ce n'est sûrement pas anodin, et les arguments ne manquent pas dans le film : Mason est un garçon qui se fiche de ce que les autres pensent de lui, et qui estime que -contrairement à lui- tout individu d'une société, même pleinement épanoui, adapte naturellement son comportement en fonction de son entourage.
Malgré une performance impressionnante (une qualité technique constante au travers les 12 années de tournage) et les 166 minutes de visionnage, Richard Linklater n'aura pas réussi à m'attacher aux personnages. L'absence de voix-off est un choix audacieux, mais il suffit de le comparer à un Donnie Darko (parmi tant d'autres) pour en saisir l'importance lorsqu'elle entache l'immersion du spectateur.
Plutôt tendresse que réel attachement, notre rapport à Mason aurait pu être mieux développé. Certains s'identifieront toutefois aisément à lui. L'acteur interprète son rôle avec brio (la passivité étant malheureusement son plus grand trait de caractère), et tend à traverser le quatrième mur pour prendre vie dans nos esprits. C'est là la plus grande force du concept, qui ne laissera clairement pas indifférent.
Enfin, il est triste de voir tout le rabattage médiatique autour d'un film qui ne tient pas ses promesses et, à l'heure du combat contre le téléchargement illégal, de constater la prétention de certaines productions.