Quand on lui a parlé de l'adaptation de Bronson, le réalisateur suédois Nicolas Winding Refn a d'abord hésité, estimant avoir déjà trop souvent traité d'hommes violents, après s'être penché sur le personnage il a jugé pouvoir donner au film une ampleur « inattendue », connaissant le réalisateur on ne pouvait que s'enthousiasmer de ce biopic consacré au prisonnier le plus dangereux d'Angleterre.

Michael Gordon Peterson, dit Charles Bronson, est un Anglais issu de la classe moyenne, quand sa tante parlait de lui elle disait : « C'était un garçon charmant. Il est visiblement brillant et toujours bon avec les enfants. Il était gentil, aux manières douces, n'agissant jamais en tyran - il aimait défendre les faibles. » rien de bien passionnant me direz vous, mais voilà Peterson n'est pas quelqu'un d'ordinaire et il a soif de reconnaissance. Pour cela il va d'abord changer de nom et adopter celui de Charles Branson, avec ce changement d'identité il va sombrer dans le banditisme dès 22 ans et se fera emprisonner 7 ans, c'est là qu'il trouvera la révélation : il passera donc sa vie à faire en sorte de rester en prison en devenant ultra violent et en étant l'auteur de bons nombres d'agissements qui lui feront obtenir le titre de « prisonnier le plus dangereux d'Angleterre ».

Loin d'expliquer les raisons de la folie du personnage, Refn va lui préférer son histoire, il lui consacre une mise en scène décalée et psychotique aux aspects plus visuels qu'explicatifs, dans le ton de sa filmographie. La vie de Peterson, tout comme son adaptation, est baigné d'un humour noir omniprésent faisant paradoxe avec la situation dramatique de l'homme et des endroits où il se situe. Jugez mieux de l'aspect comique du personnage avec ces histoires tirées de sa véritable vie : « En 1994, tout en tenant un garde en otage à la prison de Woodhill, Bronson demanda une poupée gonflable, un hélicoptère et une tasse de thé en tant que rançon. » , « En 1998, Bronson prit en otage deux pirates de l'air irakiens et un autre détenu à la prison de Belmarsh à Londres, il demanda un avion pour l'emmener à Cuba, deux Uzis, 5.000 cartouches, et une assiette de haricots. »

Le film se concentre principalement sur la période pénitentiaire du prisonnier, le réalisateur avouant son intêret sur la capacité que peut avoir la prison à pousser certains détenus à y rester, Refn présente donc ce lieu de manière psychologique, où l'on entre dans les méandres et l'inconscient d'esprits malades et torturés. Présenté comme un spectacle animé par Peterson lui même, Bronson est une œuvre d'art traversée par le génie visuel, musical et scénique de Refn. Loin d'être raté le film réussit admirablement à faire de ce biopic aux bases scénaristiques pauvres, une superbe réalisation barrée et originale.

Si les dialogues sont rares etTom Hardy. Le Pacte les acteurs aussi, il en est un qui crève le plafond, d'abord pressentis pour incarner Bronson : Jason Statham et Guy Pearce ont été remplacés par l'acteur Anglais Tom Hardy, celui ci y est magistral, entre mutisme glaçant et charisme agressif, il insuffle au personnage toute sa violence et son côté dérangeant en parvenant même à le rendre sympathique, il est l'atout principal du film.

Comme pour Valhalla Rising ( le film du réalisateur qui suivra Bronson ), l'appréciation global de Bronson est une question personnelle qui mélange l'avis artistique ainsi que l'opinion cinématographique du spectateur. Car s'il s'agit d'un biopic, il est davantage question d'une mise en avant d'un réalisateur et de son style, de son univers plutôt que d'une histoire et de son scénario. Et c'est là que se situe le problème, il n'y en a aucun, ou plutôt il est inintéressant porté à l'écran, la vie de cet Anglais banal à l'éducation classique et au besoin de célébrité obsessionnel passionne à l'écrit mais ennuie au cinéma, Bronson étant resté 34 en prison dont 30 en isolement. Malgré cela, si certains peuvent adhérer au style du réalisateur, d'autres resteront bloquer au manque d'intérêt de l'histoire du personnage, le manque d'évolution et d'explication sur le protagoniste risque d'en rebuter plus d'un, il est clair que Refn n'ouvre son cinéma qu'aux amateurs du genre et à ses fans, une raison au bide qu'à réalisé le film au cinéma ? Surement.

Bronson est un ovni, un film dans la veine de son réalisateur : très abstrait. Une expérience à vivre qui ne plaira pas à tout le monde mais qui sera, à coup sûr, louée pour la prestation surréaliste de Tom Hardy, pour qui le film vaut finalement beaucoup, et qui joue l'histoire folle d'un homme qui aimait la prison.
Nicolas_Chausso
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le 6 juin 2013

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