La réputation d’Edward Norton n’est plus vraiment à faire, notamment grâce à plusieurs grands rôles à la fin des années 90 et au cours des années 2000. Mais cela fait plusieurs années que l’acteur se fait plutôt discret. Il aura fallu attendre cette fin d’année 2019 pour retrouver l’acteur, devant la caméra dans le rôle principal, mais aussi derrière la caméra, avec Brooklyn Affairs.


Les films noirs furent légion dans les années 40 et 50, comptant, parmi leurs rangs, un certain nombre de chefs d’oeuvre. Personnages et acteurs charismatiques, ambiance caractéristique, messages politiques, les films noirs suivaient tous une base commune, mais tous avaient des des particularités les distinguant les uns des autres. Le Faucon Maltais, Assurance sur la Mort, Le Troisième Homme, Laura… Des tragédies explorant la nature humaine qui semblent définitivement associées à l’époque à laquelle elles ont été réalisées. Depuis, de nombreux films ont puisé dans les richesses du genre pour se les approprier à leur manière, comme Blade Runner, Sin City, ou même The Dark Knight. Mais peut-on encore réaliser un pur film noir à notre époque ? C’est ce qu’Edward Norton se propose de faire avec Brooklyn Affairs.


Il ne faut pas longtemps au film pour nous plonger dans cette ambiance caractéristique des films noirs. Planques, impers et chapeaux, voix off, le spectateur sait rapidement où il met les pieds. Cette ambiance, cet univers, Edward Norton va l’étoffer tout au long de Brooklyn Affairs, donnant à nouveau vie à ce New York des années 50 soumis aux mensonges et aux combines d’hommes de pouvoir, et à un racisme violent et omniprésent. Au cœur de tout cela, certains cherchent des réponses, non pas forcément pour rétablir la justice, mais pour mettre en lumière la vérité, comme le fait Lionel, le personnage principal du film, joué par Edward Norton. Atteint de la maladie de Gilles de la Tourette, il paraît maladroit, fébrile, mais cette particularité le rend surtout très humain, relativement différent des grands personnages des films noirs d’époque, troquant un charisme ténébreux contre une humilité et une opiniâtreté touchantes. Brooklyn Affairs n’est pas un simple hommage nostalgique aux films noirs d’époque, il remet le genre au goût du jour pour traiter de problématiques concernant aussi notre époque et, de manière plus large, de sujets intemporels.


L’une des principales propriétés du film noir est la mise en lumière des personnages imparfaits, cachant de lourds secrets souvent inavouables, incarnant différents aspects (souvent négatifs) de la nature humaine. Car personne n’est parfait, tout comme l’humain est, par nature, imparfait. Ici, tout est affaire de pouvoir et d’intérêts personnels qui, lorsqu’ils se retrouvent mélangés, peuvent être menés à toucher un grand nombre d’individus, voire la société dans son ensemble. Edward Norton vient chercher dans les racines de la société contemporaine pour mettre en perspective les problématiques concernant cette dernière, opérant ainsi ce retour en arrière dans l’histoire des Etats-Unis, mais aussi dans l’histoire du cinéma.


Mystères, jazz, musiques envoûtantes, décors d’époque, photographie soignée, Brooklyn Affairs réussit autant sur le fond que sur la forme. L’intrigue peut parfois être un peu tortueuse et confuse, et la durée (2h20) peut étrier un brin le récit, empêchant au film de briguer l’excellence. Mais on ne peut renier le cœur qu’Edward Norton a mis à l’ouvrage ici, avec ce film plaisant et plein d’authenticité, rappelant au bon souvenir d’une époque perdue du cinéma américain, tout en étant capable de rester dans sa propre époque.


Critique écrite pour A la rencontre du Septième Art

JKDZ29
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le 8 déc. 2019

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