Le roman de Stephen King ? Pas lu. Le téléfilm en deux parties de 1990 ? Pas vu. Mon niveau de motivation pour aller voir ce film ? Zéro… Seulement voilà, surpris par la hype qui s’est mis à monter autour de ce film, j’ai fini par me dire que cela valait peut-être la peine de me faire mon propre avis. Ainsi, c’est peut-être dans les meilleures conditions que je suis allé voir cette mouture 2017 : pas d’attente, pas de vision préconçue de l’œuvre, pas de sanctuaire à profaner… Et donc, j’avoue qu’au final, moi aussi j’en suis ressorti satisfait. Pourtant, je dois bien reconnaitre que le sentiment que j’ai eu face à ce « Ça » m’a un certain temps intrigué. Le film ne m’a pas effrayé (ce qui est un comble pour un film d’épouvante), il ne m’a pas surpris non plus, pire il n’a pas vraiment imprimé quoi que ce soit de spécifique dans mon esprit. Seulement voilà, je pense que ce n’est pas cela qui fait la force de « Ça ». Et aussi paradoxale cette affirmation pourra paraître, je pense que ce serait une grossière erreur que d’aller voir ce film dans l’espoir d’avoir peur ou de se voir révéler une œuvre singulière. Parce qu’au fond, « Ça » n’est pas vraiment un film d’épouvante. A bien y faire attention, c’est bien davantage un film d’atmosphère. Moins que l’œuvre de Stephen King ou le personnage éponyme de l’œuvre, le vrai sujet de ce film, pour moi, c’est le cinéma des années 1980. Certes il y a bien les BMX, fringues improbables et autres mulets, mais il y a aussi et surtout cette grammaire assez caractéristique de cette époque et que l’on retrouve ici. Pas de jumpscares à gogo, de musiques criardes ou de shakycams : tout repose sur les physiques et les maquillages, les lumières et les ombres, ainsi que sur une logique d’introduction progressive et par étape de la menace dont il est question. Or, si on ne prend pas ce « Ça » comme un film qui cherche absolument le frisson mais plutôt comme un film qui cherche à poser une atmosphère, eh bien il faut quand même bien lui reconnaître que son dispositif est cohérent, soigné et – si on y est sensible – efficace. Personnellement, j’ai beaucoup apprécié qu’Andy Muschietti fasse le choix de scènes propres et lisibles au profit de scènes nerveuses et sensationnalistes. Les moments qui m’ont d’ailleurs le plus marqué sont les moments qui se sont révélés les plus iconiques :
...l’enfant sans tête qui marche sans direction précise dans la bibliothèque, ces corps flottant autour du cirque de Ça ; ou bien encore ce plan assez incroyable où la caméra suit les mouvements de bras du clown tandis que la tête en son centre reste immobile de manière très perturbante.
Alors certes, tout ça se fait au désavantage d’une véritable ambiance malsaine et suffocante. Mais après tout pourquoi pas ? Pourquoi un film d’épouvante se devrait-il forcément de chercher à pousser au plus loin les limites de la peur ? Le « Ça » de 1990 n’avait pas la réputation d’être un film très flippant non plus. Vouloir faire un film assez confortable sur ce point là, pour moi n’est pas si incohérent ni improductif que cela. Voir un film qui se contente juste de mettre en place une atmosphère d’épouvante sans forcément rentrer dans une mécanique de flip intégral, ça peut avoir son intérêt aussi. Moi en tout cas je m’y retrouve entièrement. Après, malgré tout ça, je ne vais pas non plus vous mentir : « Ça » n’a pas grand-chose de plus à proposer que ce postulat que je viens d’énoncer. Dans l’ensemble, ça reste du grand classique sans véritable surprise ni patte singulière. A vouloir trop reconstituer un film des années 1980, « Ça » réinvestit des codes que tous les habitués du genre connaissent forcément. Et ce n’est pas sur le domaine du propos ou des personnages que le film a cherché à se démarquer. Bref, « Ça » ne surprendra pas, loin de là. Cependant, un peu dans la lignée de la récente série « Stranger Things », je reconnais à ce film un pouvoir certain à mettre en place une atmosphère qui a de quoi séduire et dont beaucoup pourraient se contenter. Moi en tout cas, je m’en suis contenté. Bien que modéré, mon plaisir a été réel face à ce film. Et je trouve qu’en ces temps de tristesse cinématographique, ce n’est déjà pas si mal que « ça »...