Il est des fièvres à ne pas négliger tant leurs conséquences s’avèrent désastreuses et aisément prolifiques ! Eli Roth s’empare du film d’horreur dans les bois, sous-genre qui trouva ses lettres de noblesse chez Sam Raimi notamment, pour le détourner habilement vers un huis clos paranoïaque où l’environnement joue, à part entière, un rôle démoniaque : l’atmosphère, le bruit, les mouches que l’on entend, les arbres qui se dressent verticalement comme autant de connexions entre le Ciel et les Enfers, tout cela pèse sur nos malheureux personnages tour à tour pris de cette fièvre noire, emportés par la maladie pour finir à l’horizontal, couchés sur le sol en petits morceaux. On retrouve une ambiance qui n’est pas sans rappeler le traumatisant Deliverance de Boorman, teintée d’humour grotesque aux échos lynchéens – à travers la figure du policier, les trognes du magasin ou encore les thèmes principaux composés par Angelo Badalamenti –, de sorte à proposer un Twin Peaks version Evil Dead (ou l’inverse) savoureux et audacieux. Eli Roth s’amuse en sale gosse et remplit son film d’idées de mise en scène intéressantes disposant d’un fort potentiel esthétique, de scènes gores et de folie humaine. Il fait le choix bénéfique de ne pas convoquer les esprits malicieusement évoqués par des signes destinés à rassurer (en apparence) le spectateur pour mieux le surprendre : feu ritualisé, chien possédé, déformation d’un cadre aussitôt teinté de rouge etc. Le final surprend par le grotesque généralisé et délivre une bien triste morale sur l’humanité, ce qui sera d’ailleurs poursuivi dans les œuvres ultérieures d’Eli Roth. Cabin Fever ou le talent contagieux d’un réalisateur délicieusement sadique que l’on aime suivre dans son odyssée horrifique sans limites.