Michael Haneke est le réalisateur qui défraie la chronique chez moi. Ou bien je prends un pied d'enfer devant (Funny Games, Amour) ou bien je suis le tout avec un ennui poli, parfois proche de l'énervement comme dans La Pianiste. Haneke c'est le minimalisme de la mise en scène, le refus des artifices, le caractère posé. Bref, c'est ce que j'aime mais quand c'est bien réalisé. Ici, on démarre pourtant très bien. Une vidéo angoissante, un Georges inquiet et dépassé par les événements et ensuite un beau plan-séquence. L'ambiance est posée, autant réaliste que lugubre. On se laisse porter par le cours du scénario avec une accroche digne des thrillers coréens (vu que nous sommes dans le même genre). Georges le parfait salaud partagé entre les remords et son antipathie maladive est incarné par un Daniel Auteuil très convaincant. Sa quête de vérité le conduit d'impasse en impasse. Le mystère est trop épais et la police logiquement impuissante devant. Parce que oui un jour, il faudra que certains réalisent que les inspecteurs de police ne sont pas des Madame Irma.
Et puis, inexorablement, on se rend compte que quelque chose cloche. La force de départ devient la plus grande faiblesse du film. Le rythme effectivement difficile d'accès pour certains commence à se faire ressentir comme trop apathique. Pire encore, ce refus de la sur-mesure au profit du dit réalisme laisse la place à une incohérence des réactions de ce couple de Monsieur et Madame tout le monde plongé dans un quotidien des plus moroses et rébarbatifs. On tire la moue devant la platitude des réactions des parents lorsqu'ils se retrouvent sans nouvelles de leur fils ou encore de Georges sous Xanax devant le suicide de son ex-pote maghrébin. Où se situe le réalisme dans l'histoire ? Ex-pote qu'il a fini par soupçonner sans que l'on ne comprenne trop pourquoi, perdu dans ses certitudes liés à un accident de jeunesse. Où sont les preuves ? Qu'est-ce qui l'a amené à penser ça ? C'est ça qui m'énerve. On glorifie l'ambiguë quand il n'a pas lieu d'être. Faire réfléchir intelligemment le spectateur est une chose, le faire réfléchir pour dire de le faire réfléchir dans l'espoir d'y insérer un soupçon d'intelligence en est une autre.
Ce ressenti atteindra sa conclusion dans une fin frustrante qui ne racontera rien si ce n'est de nous laisser en détective de pacotille à ne finalement même pas vouloir faire le bilan de ce que l'on a vu pour statuer sur un éventuel finish. Si le niveau de la seconde partie avait été du même niveau que la première, on aurait eu droit à quelque chose de fort. Hélas l'arrière-goût d'inachevé est un euphémisme.