Woody Allen est l’un des réalisateurs les plus prolifiques de ces dernières années avec une cadence d’un film par an depuis Annie Hall sorti en 1977. N’appréciant pas la compétition dans l’art, l'homme ne boude pas pour autant les festivals, demandant toutefois à ce que ses films soient projetés hors compétition. Ainsi, à l’édition 2016 du Festival de Cannes, Café Society, eut l’honneur de faire l’ouverture. Une belle histoire d’amour entre le réalisateur et le cinéma que l’on retrouve dans sa dernière réalisation, plongeant le spectateur dans un Hollywood des années 30 plus vraie que nature.


Cédant à l’attraction du rêve californien, Bobby Dorfman quitte son New-York natal et son environnement familial oppressant pour venir retrouver son oncle Phil à Los Angeles. Phil, agent de stars, côtoie le tout Hollywood et introduit son neveu dans le milieu. Bobby tombe également amoureux de la secrétaire de son oncle, Vonnie. Une histoire d’amour prend peu à peu forme entre le jeune homme gauche mais aux petits soins pour sa dulcinée et la jolie secrétaire qui semble totalement désintéressée par le strasse et les paillettes d’Hollywood.


La mélancolie habitant Woody Allen trouve une place adéquate dans cet hommage à l’âge d’or hollywoodien. Un hommage tant sur le plan du décor que des stars de l’époque, dont les noms sont mécaniquement cités par le personnage de Phil, interprété par un Steve Carell qui peine à convaincre dans ce registre inhabituel pour lui. L’alchimie entre Kristen Stewart et Jesse Eisenberg est peut-être ce qu’il y a de plus beau dans ce Café Society. L’actrice excelle dans le combat intérieur que mène son personnage pour choisir entre ses deux amours.


La mise en scène a tout pour être réussie mais est malheureusement gâchée par un jeu de lumière beaucoup trop insistant. En voulant illuminer l’écran de couleurs chaudes et de personnages scintillants, Vittorio Storaro noie sa photographie dans un bruit de fond quasi-permanent. Un choix qui contrebalance le jugement acerbe de l’histoire sur les faux-semblants et l’hypocrisie de ce monde dont le réalisateur s’est toujours tenu à l’écart.


Là où le bât blesse, c’est dans un scénario tiré au cordeau, qui ne laisse aucune place à l’originalité ni même au moindre petit twist qui viendrait rythmer le film. Rien de transcendant, Woody Allen fait du Woody Allen, ce qu’on ne peut lui reprocher. Mais l’absence d’une quelconque prise de risque dans ce drame romantique rend le tout, particulièrement ennuyeux. La filmographie du réalisateur est suffisamment riche pour ne pas s’attarder sur cet opus plutôt décevant.


Café Society peut cependant plaire, car on peut se laisser porter par la profondeur des sentiments entre les deux protagonistes. Une profondeur mélancolique qui imprègne l’histoire d’amour avant même que celle-ci ne commence, présageant de sa finalité.

Vincent-Ruozzi
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le 5 mars 2017

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Vincent Ruozzi

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