Quand austérité ne rime pas avec inspiré.
J'aime beaucoup les raisonnements que tiens Bruno Dumont sur le cinéma. Lors de ses interviews il parle souvent de la pauvreté culturelle actuelle,de l'exigence de faire des films pensés, du fait que beaucoup de metteurs en scène ne respectent pas l'intelligence des spectateurs, qu'ils sacrifient leurs âmes au nom du chiffre.
Je suis très globalement d'accord avec lui. Sauf que à la vision de Camille Claudel, un sentiment domine tout les autres: celui du vide. Ce film serait il à l'image du vent que l'on voit souffler en bourrasque sur les paysages de campagne qu'arpente Camille Claudel avec ses pauvres coreligionnaires?
Mais parlons d'abord des choses qui, à mon sens sont réussies. Et d'abord ce sentiment d'ennui profond, mâtiné de moments dépressifs de Camille Claudel enfermée dans cet asile. Voulu ou pas, on les ressent bien ces sentiments d'heures vides, de moments de creux et d'errance mentale. Et puis cette visite du frère, tant attendue, on la ressent cette petite étincelle de joie, cette petite lumière au bout d'un tunnel tout froid et obscur.
Lorsqu' il apparait à l'écran ce frère, ce Paul Claudel de sinistre mémoire, une sensation me traverse. Il à l'air encore plus psychotique que sa pauvre soeur ce frérot. Il soliloque, invoque Dieu avec des crispations musculaires inquiétantes. En bref il est aimé et intégré, c'est un grand écrivain et un grand bourgeois, aimant Dieu et l'église et pourtant d'ou vient cette impression d'avoir affaire à un aliéné?
D'ailleurs peu après suivra la scène de rencontre des deux personnages ou l'on comprendra sans peine que nul espoir n'est permis. Cette scène est un apex autistique, chaque personnage étant bloqué dans sa réalité et sa folie. Un questionnement demeure, qui est le plus fou des deux?
Pour le reste du film la vacuité et les scènes manquées se suivent. Une première question se pause: que fait Camille Claudel, jugée psychotique donc, au milieu d'handicapés mentaux? Lorsqu'on veut filmer la folie et les asiles, il ne faut pas se raconter/ nous raconter d'histoires qui ne collent pas. Ensuite, le jeu des acteurs non professionnels est en complet décalage d'avec celui de Juliette Binoche (Camille Claudel, hyper incarnée) et je ne parle pas de celui de l'acteur jouant Paul Claudel, qui lui empeste le théatreux. On sent que toutes les scènes sont à l'avenant, dans l'espoir d'un moment de grâce qui ne vient pas. Les longues scènes d'improvisation ont dû êtres épuisantes et ça se ressent à l'écran. Le film déroule sa lourde pelote, interminable, alors qu'il ne dure qu'une heure trente.