J'avais malheureusement loupé ce film à sa sortie au cinéma et je n'avais pas pris le temps de le regarder plus tard jusqu'à sa diffusion dimanche dernier à la TV.
Ça faisait longtemps que je n'avais pas regardé un film devant mon écran de télévision, et qui plus est, un bon film !


[ATTENTION SPOILERS]


"Captain Phillips" m'a mis une gentille gifle et il a effacé immédiatement le travail très passable que Paul Greengrass a fourni sur le dernier "Jason Bourne". Ce long-métrage sorti en 2013 nous rappelle à quel point ce réalisateur sait magner la mise en scène pour nous plonger dans une action palpitante et terriblement stressante.


Après "Bloody Sunday" et "Vol 93", Greengrass adapte ici son troisième récit issu d'un véritable fait divers. Avec toujours autant d'efficacité.
"Captain Phillips" relate ainsi l'attaque du porte-conteneurs américain MV Maersk Alabama en avril 2009, par quatre pirates somaliens. Une première tentative ratée qui se terminera par une prise d'otage du capitaine Richard Phillips en plein mer, confinée dans un canot de survie.


Nous n'avons pas une seule minute de répit dans ce film, Greengrass usant d'une mise en scène nerveuse exposant une tension progressive jusqu'au final palpitant.
Toutefois, le film marque également par le traitement réaliste des faits. Par moment, le long-métrage se transforme en semi-documentaire, tant les gestes et les termes techniques sont précis. L'usage de la caméra-épaule, marque de fabrique du réalisateur britannique, accentue cette impression.


Enfin, le film marque par l'interprétation des acteurs, Tom Hanks et Barkhad Abdi en tête.
L'acteur californien livre ici l'une de ses plus belles performances. Un homme au profil ordinaire, chef d'équipe professionnel et autoritaire, qui va devenir une victime séquestrée et exposée à une terrible négociation entre des criminels et l'armée américaine.
Les dix dernières minutes sont saisissantes, de l'assaut du SEAL au sauvetage du capitaine traumatisée. La dernière séquence d'accompagnement psychologique de Phillips permet à Tom Hanks de déployer toute sa force d'acteur. Une scène qui me donne encore des frissons et qui m'a fait monter les larmes, tant le réalisateur pique le spectateur au vif.


Le réalisme de la réalisation et de la direction d'acteur permet de travailler la relation psychologique des personnages avec subtilité. Les pirates ne sont pas décrits comme de "gros méchants" sanguinaires. On y décèle une âme, une certaine fragilité infligée par leur condition sociale violente. Des éléments qui sont captés par Phillips, symbole du développement occidental, et qui essaye donc de jouer avec ruse pour déstabiliser moralement ses kidnappeurs. Un levier du récit qui atteint son apogée lors de l'intervention de l'armée américaine, avec son déploiement de gros navires et de gros gadgets face à quatre somaliens armés de kalachnikovs.
Le seul bémol se situe juste dans l'opposition des deux cultures, les pirates somaliens étant un peu trop exposés comme les "neuneus de service", faibles donc influençables. Un défaut pallié par le jeu d'acteur convainquant et par cette idée que l'instinct de survie prend une dimension commune entre les pirates et leur otage. L'armée américaine étant les seuls garants de la survie ou non de ces derniers. "Ça va aller l'Irlandais", leitmotiv verbal du chef des pirates qui sonne ainsi comme une douloureuse sentence.


Bref, il y a de quoi réfléchir avec ce film une fois libéré de la tension qui nous scotche pendant plus de deux heures. Très heureux d'avoir découvert un très bon Greengrass, même trois ans plus tard.
Il aurait été bête de louper l'une des meilleures performances de Tom Hanks quand même...
De quoi me rappeler que je dois également visionner "Le Pont des Espions" de toute urgence !

Théo-C
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 28 sept. 2016

Critique lue 302 fois

Théo-C

Écrit par

Critique lue 302 fois

D'autres avis sur Capitaine Phillips

Capitaine Phillips
drélium
8

Tom encore bée

Passons sur la prestation de Tom Hanks qui ira de flasque à formidable d'intensité, je choisis formidable d'intensité, Capitaine Phillips m'a, comme espéré, emporté dans son sillage se montrant très...

le 12 févr. 2014

34 j'aime

8

Capitaine Phillips
busterlewis
9

La rage de vivre

Il est peut-être temps de reconnaître la cohérence, le style et la minutie du cinéma de Paul Greengrass qui réussit toujours à se renouveler, à se placer devant de nouveaux défis. Capitaine Phillips...

le 23 nov. 2013

31 j'aime

Capitaine Phillips
Gand-Alf
7

Hostages.

Cinéaste pointilleux, soucieux de coller au plus près de la vérité et aussi à l'aise dans le cinéma à grand spectacle que dans la politique-fiction, Paul Greengrass s'attarde cette fois sur la prise...

le 16 avr. 2015

19 j'aime

Du même critique

Random Access Memories
Théo-C
9

De l'or en barrettes

Les Daft Punk ne sont pas les artistes les plus présents médiatiquement parlant sur la scène musicale. Sans doute faut-il entretenir le mystère autour des deux masques robotiques. Mais ce "Random...

le 14 mai 2013

42 j'aime

3

The Marshall Mathers LP 2
Théo-C
6

"Eminem killed by M&M !"

C'est un petit peu l'histoire "rapologique" du MC et sa singularité. Un rappeur jonglant entre différentes personnalités, du Shady totalement déjanté, au Marshall plus sentimental, en passant par le...

le 9 nov. 2013

33 j'aime

2

Quand vient la nuit
Théo-C
8

Plus je connais les hommes, plus j'aime mon chien

Michaël R. Roskam est un cinéaste à suivre de près. Découvert, pour ma part, avec l'excellent et surprenant "Bullhead", le belge confirme ses qualités de réalisateur avec ce nouveau film made in...

le 17 nov. 2014

29 j'aime