De fortes espérances non quelques craintes



Captain america : civil war », premier film de la phase 3, mais surtout opus très attendu parce qu’il s’agit là de l’adaptation d’un des crossover marvel les plus réputé, qui avait à l’époque réellement divisé toute la communauté super-héroïque. Des interrogations étaient apparues au moment de l’annonce d’un tel choix : les films marvel avaient-ils assez de personnages pour pouvoir adapter une histoire fidèle aux comics, qui intégrait également tous les autres héros dont les studios ne possèdent pas la licence (X-men, 4 fantastique…) ? La question était plus que légitime. C’était avant toutefois, qu’en raison de résultats désastreux au box office, Marvel studio ne parvienne à trouver un accord avec Sony, détenteur de la licence Spiderman au cinéma, pour pouvoir utiliser le personnage. Et notons qu’en seulement quelques longs métrages, plusieurs nouveaux héros ont fait leur apparition, du Soldat de l’Hiver à Ant man en passant par Wanda et Vision.
De fait, le film se retrouve avec un nombre étonnant de protagonistes, et c’est surtout par cet aspect que le film suscitait l’attente. Avec autant de super-héros en action, ce Captain america fait encore plus fort que les Avengers précédent, ce qui est étonnant pour un film supposé être solo et tranche avec les structures précédentes. Est-ce un tournant pour les films à venir ? Le changement tant espéré pour ceux qui trouvaient que tous les films Marvel se ressemblent ?
Voir autant de super-héros à l’écran est certes un vrai plaisir pour les fans et les amateurs de ce genre de divertissement, mais est-ce que pour autant ils allaient bien tous s’intégrer à l’écran, ou la psychologie allait-elle être mise de côté, révélant les limites du format film pour ce genre d’histoire de grande envergure?


Une attente élevée donc mais non sans quelques craintes. Marvel est un peu trop connu pour son humour bon public forcé qui plombe parfois les films, à l’image d’un « Iron Man 3 » dont la bande annonce promettait pourtant une tonalité plus sombre. Avec de tels enjeux cet humour apparaîtrait totalement inadéquat et gâcherait complètement l’histoire.


Les films Marvel représentent la particularité qu’on ne les appréhende pas juste comme des films à part entière, mais également comme faisant partis d’un plus grand ensemble. Avec l’aspect adaptation, le film parlant tout autant aux lecteurs de comics qu’aux néophytes, il y a finalement beaucoup à dire, en bien comme en mal (ce qui explique ma longue critique je m’excuse par avance…).



Le grand nombre de personnages



A la question chaque personnage est-il développé de façon adéquate ?
La réponse différera selon les personnes, pour ma part je pense que le résultat est plutôt positif. Si bien sûr tout le monde n’est pas logé à la même enseigne –Vision, intégrée récemment dans des circonstances particulières, cherche encore sa place, et War Machine est très secondaire, sorte de copié-collé de iron man sans personnalité qui se démarque- la plupart ont leur rôle à jouer. L’avantage de les avoir développé auparavant sur d’autres films, c’est qu’il n’y a pas besoin de beaucoup de scènes pour les exploiter. Quelques dialogues suffisent, faisant référence à ce que l’on sait déjà dans les films précédents, pour connaître leur ressenti et leur avis sur les événements.. Les scénaristes parviennent ainsi facilement à gérer ce grand nombre de protagonistes, se payant même le luxe d’en intégrer des nouveaux –un nouveau ancien comme Spiderman mais aussi un totalement inconnu comme la Panthère noire. Civil war se montre ainsi beaucoup plus structuré que son équivalent DC Batman vs superman, avec son introduction maladroite de la Justice League. Ce « Civil War » confirme la volonté des scénaristes de miser sur de nouvelles têtes plutôt que conserver les visages connus, l’équipe initiale n’étant plus du tout d’actualité.


Ainsi, Black Widow est divisée entre les deux camps, son adhésion au contrôle gouvernemental et son soutien à Captain america ; la Sorcière Rouge fait ses premiers pas difficiles comme super-héros, d’avantage perçu comme un danger à cause de ses pouvoirs ; le Faucon possède un fort capital sympathie, et s’il suit Steve Rogers jusqu’au bout, il s’assure que ce dernier sait ce qu’il fait.
Du côté des nouveaux, Spiderman (Tom Holland) parvient efficacement à faire oublier la précédente version, et la Panthère Noire, roi T’challa du Wakanda, s’avère charismatique, par son côté exotique dû à ses origines, son accent et sa culture africaines. C’est un être de principe qui tente d’agir avec sagesse. Un film centré sur ce personnage, ainsi que son pays (bien connu des lecteurs), devient dés lors très attendu.
Avengers 2.5 ou Captain america 3, Captain america reste le personnage central, bien que partageant à quasi égalité le temps d’apparition et l’importance dans l’histoire avec son allié en armure. A son réveil il avait été accueilli et recruté par le SHIELD et intégré dans la super équipe Avengers, maintenant il doit désormais suivre sa propre voie.



Une ambiance plus sombre



L’histoire commence de la même façon que les comics, par un accident tragique impliquant des super-héros. La question est posée : peut-on les laisser agir en roue libre comme bon leur semble ? Ou doivent-ils être contrôlés, rendre des comptes et à qui ? La question est épineuse : l’ingérence parmi les autres nations se pose, ainsi que la corruption et les intérêts divergents de chaque gouvernement.
Une méfiance que subissent également des héros « street » comme Daredevil et jessica jones, avec des humains formellement opposés à ce qu’ils préfèrent nommer « justiciers » au lieu de héros.


Les avis divergent inévitablement, certains ayant la fibre patriotique (War machine, et non contrairement à ce que l’on pourrait penser Captain america n’en fait par partie), acceptent de respecter les lois, d’autres plus terre à terre acceptent le compromis de contraintes inévitables (la Veuve noire). D’autres comme Stark obéissent à un sentiment de culpabilité. Faucon voir la Sorcière Rouge suivent Rogers par loyauté ou amitié, tandis que la Panthère Noire est animée par la vengeance.
Chacun a une raison différente de rejoindre tel ou tel camp. Certains diront que ces justifications sont faibles (tandis que certains diront qu’il y a trop de dialogues…), elles n’en existent pas moins et restent plutôt cohérentes avec la psychologie de chacun, le tout formant une répartition plutôt varié. Certains auraient certes mérités d’être plus étoffés (Œil de Faucon, Vision), mais on touche là aux limites évoquées du format film.


Dès le début on peut donc se rassurer sur le fait que la bande annonce n’ait pas mentit, la tonalité est effectivement plus sombre. Nos héros sont confrontés aux conséquences dramatiques de leurs actions. De la même façon que « Batman vs Superman » évoquait le bilan humain des événements survenus dans « man of steel », les nombreuses pertes qui n’étaient pas vraiment pris en considération dans les films précédents reviennent sur le devant de la scène. Un fait assez rare au 7ème art ou un film apporte un complément à un volet précédent,


On découvre un Tony Stark légèrement différent de d’habitude, plus usé, fatigué, tourmenté aussi. Ce film a réussi à faire ce que « Iron man 3 » n’était pas parvenu, rendre l’homme en armure sombre. Son application pour la défense de la planète lui a coûté son amour pour Pepper, a résulté en la création du maléfique Ultron, ce qui a entraîné les événements en Sokovie avec les conséquences que l’on connaît. Une dévotion auquel s’ajoute un égo fort qui le pousse à se considérer comme LE principal défenseur de la Terre. On comprend dès lors que cet homme qui a commis plusieurs erreurs juge nécessaire qu’un contrôle soit opéré sur leurs actions. A l’inverse Captain america reste fidèle à lui-même, à ses principes inébranlables, et n’accepte aucun compromis. Une incarnation de la perfection, difficile à raisonner, qui a tendance à agacer le milliardaire excentrique, qui lui ne peut parvenir à un tel idéal.
Il est facile de penser que Captain america est un héros patriotique, du à son nom, mais la réalité est en fait plus complexe. Si « le soldat de l’hiver » ne l’avait pas assez démontré pour la plupart des gens, ce 3ème film devrait le prouver définitivement (ou pas certains sont têtus). C’est Steve le premier qui a parlé du danger à obéir aux gouvernements. Il ne se bat pas pour son pays en particulier, mais pour ses principes auxquels il croit fermement. C’est pour cette raison qu’il n’a pas hésité à transgresser les lois qu’il était pourtant censé défendre.


La division est là, mais ce qui va exacerber la situation est la réapparition du Soldat de l’Hiver et d’un complot apparemment plus vaste. Sans se soucier de passer pour un criminel, Steve va tout faire pour secourir son ancien ami, l’empêcher de se faire tuer, quitte à l’arrêter lui-même.
A ce stade, il est difficile de savoir pour qui prendre position, tant les deux côtés ont leurs propres arguments et leurs faiblesses. Du côté de cap’, il perd toute objectivité lorsqu’est impliqué son ancien ami, qui le ramène à son passé qui lui a été arraché. Et c’est justement ce genre d’action inconsidérée que vise à prévenir une supervision internationale.
Et si Iron man agit par ego et n’hésite pas à recruter de jeunes recrues en les forçant plus ou moins à le rejoindre (je laisse deviner qui), Steve lui n’hésite pas également à faire intervenir des alliés pourtant non impliqués (Œil de Faucon, qui profitait d’une retraite méritée avec sa famille), embarquant dans son sillage ceux qui le suivent par loyauté. Chacun est persuadé d’avoir raison, l’affrontement est inévitable…


Malheureusement, la suite de l’histoire, avec un complot que n’aurait pu déjouer une équipe opérant sous contrôle, oriente nettement le conflit du côté de cap’ et coupe court au débat… (débat qui avait été aussi un peu laissé tombé du côté comics il faut le reconnaître).


Je suis soulagé malgré tout que le film ne se termine pas malgré tout sur une réconciliation facile de l’équipe, et que les scénaristes soient parvenus à maintenir le schisme.


A noter que comme Avengers 2 on voyage pas mal : Afrique, Londres, Berlin, Sibérie... c'est toujours plaisant de ne pas avoir une action qui se situe exclusivement aux Etats-Unis.



Un humour pour une fois bien dosé



C’était une tare dans laquelle était malheureusement tombée avengers 2, fort heureusement « civil war » y échappe, ce qui aurait vraiment plombé l’histoire. L’humour est très efficace et bien dosé, que ce soit les punchlines de Stark, les comiques de situation, et surtout un Spiderman très bavard même en plein combat, énervant ses ennemis tout autant que ses alliés. Le film sait décrocher des rires sans faire culpabiliser. Pourtant avec cette histoire bien particulière, je pense que j’aurais tout simplement préféré qu’il n’y ai pas d’humour du tout ou très peu. Cela nous aurait certes privé d’un Spiderman bien sympathique, mais cela aurait donné une toute autre ampleur au conflit. Là la fameuse baston entre les deux groupes ressemble presque plus à un tournoi entre 2 équipes qui jouent de leurs pouvoirs comme s’ils joueraient au foot (bien qu’étant très réussie d’un point de vue technique) … Mais il n’est peut être pas très juste de demander à Marvel de changer radicalement de style.
Difficile donc, malheureusement, de garder conscience des enjeux avec autant de vannes, même réussies. Il y avait sans doute des façons adroites de rendre l’affrontement plus dramatique.


Par exemple en faisant tuer War Machine au lieu de lui permettre de survivre, même paralysé…


Le film se rattrape cependant sur cet aspect par des scènes fortes, comme sur la fin entre l’affrontement violent des 2 héros suite à une nouvelle source de conflit, qui lorgnerait presque du côté Batman et Superman.



Des scènes incroyablement funs



Et parlons-en justement de cette fameuse baston. Jusqu’à présent seuls les films Avengers et les X-men étaient parvenu à regrouper autant de super-héros aux pouvoirs variés. Ici les frères Russo réussissent avec brio à combiner tous ces perso et pouvoirs différents dans des scènes bien chorégraphiés avec beaucoup de fun, égalant pratiquement le savoir faire de Joss Whedon. Je sais qu’il y en a plusieurs pour trouver le contraire, je ne m’intéresse pas assez à la réalisation d’habitude pour juger, mais dans la mesure où moi je suis parvenu à suivre toute l’action, je ne comprends pas très bien comment on peut dire que c’est brouillon… La fameuse séquence d’affrontement donc, à l’aéroport, offre un festival de pouvoir jouissif. Ça vol, ça tire, ça saute, ça court, ça s’envoie des vannes… c’est un vrai plaisir. Même ceux qui n’ont qu’une importante mineure et introduit tardivement ont leur petit moment (Giant man !).
La bataille de l’aéroport n’est évidemment pas la seule, que ce soit l’affrontement avec Crossbones, où les courses-poursuites pour arrêter le Soldat de l’Hiver, tous sont agréables à voir.



Un univers qui prend forme



Suite de « winter soldier » et se situant directement après « l’âge d’Ultron », beaucoup de références sont faîtes aux précédents films. La toile tissée par le MCU (Marvel Cinematic Universe) commence véritablement à prendre forme et le résultat est plaisant, là où on reprochait parfois à certains films d’être isolé et de ne pas avoir de réelle utilité.


Alors si l’adaptation ne transmet pas toute la richesse et l’intensité des enjeux du comic dont il s’inspire, « captain america : civil war » réussit malgré tout à marquer le coup et proposer une histoire aux ambitions plus élevés qu’à l’ordinaire et à l’ambiance plus sombre. Il apporte la promesse d’une nouvelle ère et de prochaines histoires séduisantes, en attendant la prochaine grosse réunion aux dimensions épiques de Infinity war.


Mais malgré tous ces aspects concernant ce film, il y en a toujours pour dire que tous les marvel se ressemblent, que les enjeux sont faibles et mal développés.
Alors je suis peut-être trop fan et pas assez objectif, je manque peut-être d’imagination ou de recul pour me représenter ce que pourrait donner une adaptation moins dictée par un cahier des charges grand public, ou alors certains se contentent de reproches faciles envers Marvel qui est devenu l’incarnation du manque d’audace des grands studios américains. Je n’ignore pas qu’il y a un fort aspect financier qui peut écœurer, les décisions étant prises par des gens plus intéressés par les rentrées d’argent que par faire de l’art, mais pour ma part je préfère me focaliser sur les ambitions à l’œuvre et l’univers que les créateurs tentent de mettre en place.
Quoiqu’on dise, Marvel est le premier à représenter au cinéma le style d’histoire complexe et de grande ampleur des comics. Les adaptations sont certes loin d’être irréprochables, mais loin d’être honteuses.
Finalement, si il y a bien une chose qui ne change pas à chacun de leurs films, c’est bien ce genre de remarques…

Enlak
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le 6 mai 2016

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