Les hasards d’une rencontre, les hasards d’une vie. Tout le cinéma de Claude Lelouch pourrait se résumer ainsi, de ses thématiques à sa mise en scène et son montage hasardeux, en constante évolution et redéfinition au gré des entrées et sorties des personnages. Chacun sa Vie prolonge modestement cette trajectoire, d’abord avec lourdeur et confusion – mais peut-être la confusion était-elle inévitable, offrant au spectateur un vestiaire où se familiariser avec les protagonistes et leurs relations, où se familiariser aussi et surtout avec l’élaboration du récit, succession de saynètes comme un chanteur déroule son best of devant ses fans un soir de concert. Quoi qu’il en soit, il y a dans ce film à boire et à manger, et le caractère hétéroclite (sinon fourre-tout) de l’ensemble réserve de beaux moments, mais aussi de longs égarements qui attestent l’épuisement du dispositif mis en place. Le réalisateur dirige inégalement ses comédiens – mais les dirige-t-il vraiment, telle est la question ! –, trouve en Johnny Hallyday son personnage le plus attachant, en Éric Dupond-Moretti son personnage le plus touchant, l’échange qu’il a avec une prostituée constituant l’une des grandes réussites d’un long métrage trop long. Avec en prime des blagues signées Jean-Marie Bigard et une Chantal Ladesou aux lunettes bleu foncé. Voilà un essai qui trouve dans son dispositif narratif qualités certaines et limites nombreuses.