Dans un futur très proche à Johannesburg, en proie à une criminalité incontrôlable, le police agrandit ses effectifs avec une armée de droïdes. Le créateur de ces robots, au service d'un fabricant d'armes, continue de bidouiller chez lui pour tenter de coder une conscience.html qu'il va finir par tester sur une machine vouée à la casse. Le monstre de Frankenstein va dépasser toutes les espérances.

Derrière son titre et son affiche pas très reluisants (les sirènes du marketing) se cache une petite merveille. Au point qu'en sortant de la salle, mon ressentiment à chaud était de crier au chef d’œuvre ! A ce propos, seul l'avenir nous le dira mais Chappie s'affirme bel et bien comme une référence de la SF et plus particulièrement de la real SF (terme inventé à l'instant), propre au cinéma de Neill Blomkamp. Le réalisateur sud africain, en seulement trois films, a déjà sa patte personnelle qui confère à sa courte filmographie une logique imparable. Après le très moyen Elysium, il montre que District 9 n'était pas son premier et seul coup de génie.

Je définirai la real SF comme la rencontre de la science fiction et de ses codes avec les problématiques bien réelles de notre monde moderne. Neill Blomkamp bouscule les préjugés en nous confrontant à des cas extrêmes d'immigration (District 9), de lutte des classes (Elysium) et cette fois d'intelligence artificielle. Chaque décennie à son film avant-gardiste sur la robotique ou le clonage et Chappie rabat les cartes avec toutes les questions éthiques et technologique que cela pose aujourd'hui, de notre dépendance à la technologie aux lubies de la répression comme solution aux maux de la société. Pour preuve, l'histoire se déroule en 2016 et même si le fond est forcément déjà vu, la forme prend une ampleur suffisamment considérable pour nous faire ressentir une sensation de vertige devant l'éventualité de reproduire la conscience humaine sur un programme informatique, et de son implantation dans une machine. Et le film va encore bien plus loin qu'on pourrait le penser ! Vous prendrez bien une dose de théorie du Tout.

Dès lors, une telle puissance évoque de nombreuses questions comme l'importance fondatrice de l'éducation et notamment la question du bien et du mal. Que d'irritations quand notre couple de brigands apprend les mauvaises manières à ce robot au design fantastique. L’esthétique et les animations de Chappie arrivent à capter notre empathie. On ne peut donc que louer le travail des équipes du film pour intégrer un tel personnage et le rendre crédible dans un univers réaliste. C'est l'étendard bafana-bafana Sharlto Copley qui donne sa voix et ses mouvements aux robot.

Cette profondeur inédite n'est pas annihilée par le côté action qui s'intègre cette fois très bien au récit. Ainsi, le rythme ne ralentit jamais et les quelques temps morts sont aussi vivants que la fascination que crée le droïde dans notre esprit. Dans ce cas, on pourrait même considérer l'excès de rythme comme un défaut car il est clair qu'on ne se repose pas une seconde. La patte Blomkamp se retrouve également dans les accessoires flashy, les armes, les tronches des personnages tout droit sortis de Mad Max. Par contre il ne peut pas s'empêcher de créer des méchants très méchants aux excès capillaires notoires (le mini mullet de Hugh Jackman, modèle de mauvais gout) ou gourou du capitalisme (Sigourney Weaver). Un choix d'acteurs au demeurant pas anodin pour Sony, produisant le film, qui a placé quelques noms pour éviter le risque d'un échec commercial. La marque japonaise en profite pour se goinfrer de placements de produits à base d'ordinateurs Vaio et de PS4 flambant neuves. Ah oui, Hans Zimmer signe aussi une bande son très Nolanesque, sans imagination, mais tout à fait correct.

Coup de génie à n'en pas douter, Chappie arrive à surprendre et à pousser l'imaginaire du spectateur dans des endroits inattendues. Clairement dans son temps entre fracture sociale et explosion de notre dépendance à la technologie, le nouveau film de Neill Blomkamp rassure brillamment après l’échec Elysium sans renier son credo. Malheureusement, c'est à cause d'une promo pire que banale que Chappie risque de passer relativement inaperçu... En attendant la postérité ? Plutôt intéressant pour un film qui parle d’Éternité.
ZéroZéroCed
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le 11 mars 2015

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ZéroZéroCed

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