Atom Egoyan est un cinéaste de la chair. De la chair féminine. Le mystère de La Vérité nue reposait sur le cadavre d'une plantureuse serveuse d'hôtel, retrouvé nu dans une baignoire. L'intrigue de Chloé, librement adaptée du film français Nathalie, s'articule sensuellement autour du corps d'Amanda Seyfried, véritable fleur du mal à l'insoutenable regard cristallin. Catherine (Julianne Moore, toujours aussi magnifique de fragilité) soupçonne son époux de la tromper. Elle engage alors une jeune prostituée de luxe, Chloé, pour le tenter. Ce jeu trouble la dépasse littéralement. Perdant peu à peu le contrôle de la situation, elle finit par succomber aux charmes vénéneux de la jeune femme.

Oublions le rôle totalement terne de l'époux confié à Liam Neeson. L'homme ne semble être qu'un prétexte, très vite évincé du jeu érotique mis en place par sa femme. Egoyan ne s'intéresse qu'à la pulsion grandissante qui rapproche l'épouse, d'âge mûre, et la jeune prostituée. La première, mortifiée par la peur de vieillir, retrouve en sa cadette la fraicheur de ses vingt ans. La caméra épouse la fusion progressive de leurs corps, dans une interminable caresse visuelle. Frémissements irrésistibles du visage de Julianne Moore, courbes affolantes d'Amanda Seyfried... La fascination culmine lors d'une scène d'amour lesbienne renversante de beauté, de volupté, où, dans une sublime lueur mordorée, le balancement langoureux de l'image capte la moindre vibration de plaisir. Esthétique et érotique ne font qu'un.

La réussite visuelle et sensorielle de Chloé ne parvient cependant pas à masquer quelques faiblesses au niveau de la construction des personnages et de leur histoire. Un film tellement graphique qu'il perd un peu de son âme. La psychologie se dilue dans des clichés éculés du drame érotique ou sentimental, à tel point que l'identification devient difficile. L'ardeur des images se consume dans la froideur du propos.

Mais le génie visuel du cinéaste suffit à nous hypnotiser jusqu'à la dernière minute. Son indéniable talent de metteur en scène sauve le film tout entier, qui, entre des mains moins expertes, aurait laissé un arrière-goût d'échec. Il faut dire qu'Egoyan filme les femmes comme personne, amoureusement. Un amour d'artiste plus fort que tout.
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le 6 août 2010

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