Ah Marseille, son accent chantant, son port, ses calanques, sa bouillabaisse. Et puis ses cités gigantesques aussi, ses dealers, ses gangs, ses règlements de compte, ... Pour coller au plus près de ce qui constitue certainement l'un des endroits les plus dangereux en France, le réalisateur Karim Dridi s'est installé au coeur d'une cité marseillaise pour mieux appréhender le quotidien de ses habitants. Et pour que son film ait l'air encore plus réaliste, le metteur en scène n'a engagé que des comédiens non-professionnels. "Chouf" est une plongée totale dans l'univers du grand banditisme marseillais sous forme de docu-fiction. Dridi a ici grandement privilégié le réalisme et la critique sociale à toute forme de sensationnalisme ou de tragédie. Et pourtant, dans un tel contexte, ce choix n'apparaît pas forcément judicieux. Explications. Si le réalisateur maîtrise visiblement les codes dont usent les protagonistes de son film, il n'en est pas autant du spectateur lambda. Les motivations du personnage principal apparaissent très souvent floues et vides. En effet, s'il se retrouve très souvent confrontés à ses "pairs", qu'en est-il de son évolution au sein de sa famille? Les choix du personnage auraient étés intéressants à observer à travers le prisme de sa relation conflictuelle avec ses proches et pourtant, seulement deux scènes nous éclairent sur ce point. Par ailleurs, le message du film est très clairement celui d'un déterminisme social porté par ces jeunes de cité à qui l'on offre aucun avenir. Pourtant, aucune réflexion n'est développée et l'on se retrouve à regarder défiler des scènes où une certaine réalité nous frappe en plein visage sans que ne soit dénouées les racines de cette situation. En privilégiant l'aspect documentaire, Karim Dridi nous livre un hybride à la croisée de "Dheepan" et d'une émission Arte. Sauf que "Dheepan" contenait beaucoup de coeur et de cinéma et parvenait à rendre son sujet grave et spectaculaire à la fois. Ici, il faut avouer que l'on s'ennuie vite...