Tandis que d’autres mettent la priorité à enterrer "l’ancien monde" et à s’ouvrir à un "monde d’après", il est encore temps de se tourner vers un passé pas si lointain (1960) pour replonger dans une société exempte de télévision et de publicité tapageuse. Jean Rouch et Edgar Morin ont réalisé ce film documentaire gratifié du "prix de la critique" à Canne (1961), premier d’un genre décliné à toutes les sauces depuis. Ils laissent simplement s’exprimer des parisien/nes, non pas des privilégiés mais bien au sein de la masse populaire, des jeunes adultes responsables et qui ne sont pas dupe face à un système inégalitaire et déloyal. On sera impressionné par la justesse et la clairvoyance de ceux et celles qui n’ont généralement pas chapitre à la parole et surtout par les aspects demeurés contemporains de cet esclavage moderne qui n’a cessé de se développer. Les différentes réflexions sociétales n’étaient pas nourries par une pensée unique relayée à l’identique dans tous les médias et chacun/e avait les outils pour se positionner de façon lucide, sans artifice et à cœur ouvert.


Personne n'est à l'époque entraîné à jouer les reality-show si ce n'est les starlettes qui pavanent à Cannes et surtout durant les premières minutes, on peut trouver les attitudes, des réalisateurs comme des intervenant/es, très maladroites. Bien vite, on est entraîné à dépasser ces considérations. Il s'agit également ici d'une mise en abîme du cinéma, de ce qu’il comporte d’impudique et de sa quasi-impossibilité à être dans le vrai, sans triche et sans artifice.


Le constat essentiel et qui donne à ce film une valeur ajoutée aujourd’hui tient dans l’intégrité des intervenant/es, jouant à être eux-mêmes, sans comédie, sans lieu-commun et réflexions toutes faites. On comprend que notre système actuel a perverti les discours en les stéréotypant et que le niveau d’éducation moyen s’est effondré. Nous avons bien plus à retrouver de cet "ancien monde" qu’à se mouler dans un nouveau !

tobor
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le 13 mai 2020

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tobor

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