Bal tragique chez Gaspar Noé

J'aurai beaucoup de mal à parler d'un tel film autant que j'ai eu du mal à amphorer à la fin de la séance du Fifigrot de Groland. Et je le déconseille, même si j'ai mis une assez bonne note.


C'est une expérience sensorielle qui ressemble à du spectacle total avec krump, techno, voguing ... Voilà pour donner une idée la plus nette possible à ceux qui n'ont pas vu le film.


«  Vous savez comme moi ce qui importe », dit en souriant Gaspar Noé dans l'interview en intro, sur fond de drapeau tricolore. La plupart autour de moi (et peut-être vous aussi) ont saisi de suite l'allusion. Moi pas tout à fait. Je m'interroge encore à vrai dire sur ce qui importe. Sûrement pas assez cartésien, j'ai compris la syntaxe mais je beugue encore sur le sens.


Qu'a-t-il voulu dire ? Que l'important c'est le drapeau, c'est l'amour du pays ? Improbable . Que c'est aligner des plans-séquences comme on aligne les verres de pastis? Hors sujet. Qu'est-ce qui importe ? J'aurais parié pendant le film qu'il parlait du chaos, mais d'un chaos fondateur... Le chaos d'où naissent les étoiles comme disait Charlie Chaplin. Mais à la fin du film le chaos donne plutôt naissance à un trou noir.


J'ai aussi pensé à un message écolo caché: un cycle sur le réchauffement climatique qui se révélerait seulement après plusieurs plusieurs films : Irréversible. Climax. Attendons de voir le titre d'un prochain film : Dérèglement ? Mais j'ai parfois tendance à aller chercher un peu trop loin.


Je crois à la réflexion que Gaspar Noé voulait parler simplement de la danse, de l'expression corporelle. Nina McNeely Style. Mais c'était loin d'être évident au départ j'avoue. Et puis pourquoi alors tout est tellement dégueu si la danse est le seul sujet ?


Ce serait soi-disant la faute à la sangria empoisonnée. Ah Ah Ah ! Racontez ça à d'autres ! Je crois qu'il faut aller chercher le message dans les doux souvenirs nostalgiques de notre lointaine jeunesse.


Je me rappelle fort à propos de la légende noire du disco. Le disco, disait-on autrefois, pousse à l'auto-destruction et provoque des crises de démence baveuse. Il y aurait eu des vagues inexpliquées de suicides et des agressions sauvages après avoir trop écouté et dansé sur du Sheila et sa chanson C'est le cœur, Les ordres du docteur. J'avoue ne pas avoir cru à cette rumeur à l'époque. La jeunesse ne croit à rien. Mais il y a eu de nombreuses plaintes déposées mettant en cause Patrick Juvet ou Ottawan . Et Issei Segawa le japonais cannibale était lui aussi un fan absolu de disco en 1981...Du coup les gouvernements ont réagi et le disco a complètement disparu de la circulation jusqu'à ce que vienne... la techno.


Gaspar Noé n'a rien inventé, il a laissé carte blanche à l'improvisation des danseurs. «  Ce film est comme un documentaire» , précise-t-il. Et le résultat est... un mauvais trip jusqu'en enfer.
L'écoute répétée de Supernature de Cerrone provoque l'auto-mutilation avec une lame. Un couple en train de baiser sur Daft Punk subit une longue agonie en rouge. Un enfant meurt électrocuté dans une armoire électrique et une femme est brûlée vive à cause du Born to be alive de Patrick Hernandez. (Pardon pour les spoils). D'autres événements effroyables se sont ensuite enchaînés que je ne vais pas tous citer, j'en ai dit bien assez dans l'horreur..


Gaspar Noé est à l'écoute du monde, c'est un lanceur d'alertes comme on dit. Son discours est très clair et je crois qu'il dit la vérité. N'allez pas voir ce film, ou allez le voir avec des boules Quies. J'ai moi-même écouté la bande-son et je m'inquiète grave pour mon avenir et celui de l'humanité. Car tout le monde a écouté du disco ou de la techno un jour ou l'autre dans sa vie. La femme ensanglantée qui s'écroule sur la neige au début du film sera peut-être la dernière survivante de l'humanité.

Zolo31
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le 22 sept. 2018

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