Amateur de sensations filmiques recherche un remède à son insatisfaction primaire. Bonjour tous. Bienvenue. C'est important de souhaiter la bienvenue. Ma confession est la suivante : Climax est ma défloration pour ce qui concerne la sauce Gaspar Noé.


Généralement quand on parle de sa première fois t'as toujours un connard pour te dire que c'est pas grave si ça dure pas, si tu durcis pas ou que ta partenaire endure tes coups de boutoirs maladroits. J'ai pas eu à me plaindre de ça, encore moins au cinéma. C'est une expérience. Pas désagréable vu que t'en jouis malgré toi. Pas agréable pour les mêmes raisons.


Là ça te parle d'une soirée. D'une putain de méchante soirée où faudrait ni y fourrer les pieds ni quoi que soit d'autre d'ailleurs. Une troupe de danse y célèbre ses répétitions qui détonnent comme pas deux. Au début ça va, les humeurs s'échauffent aux contacts langoureux de corps enfiévrés. Tout le monde y va de sa patte, de sa personnalité, de son énergie et relâche la pression en un torrent de gesticulations. Puis vint un verre de sangria. Deux verres de sangria. Trois verres de sangria. Quatre, cinq et j'en passe. Le bol se fait enfiler sévère. À croire qu'ils avaient soif les loustiques.


L'alcool, comme on dit, ça favorise les confessions. Vient le temps des discussions de comptoir. Machin couche avec truc, bidule aimerait se taper machin mais truc s'en mêle et...bref l'habituel charivari de soirée où ça cause cul, tout ce qu'il y a devant et puis autour, comme ça pas de jaloux.


Là ça dérape sur la mélasse. Une donzelle se sent drôle, une autre s'hystérise. Effet domino : on devient tous dingue. Quelqu'un aurait foutu de la drogue dans la sangria. On sait pas quoi ni en quelle quantité. Pas de pitié pour les croissants, ça vire chocolat. Bienvenue en enfer !


C'est un peu jacter pour rien mais il faut dire que ce film est incroyable à sa manière. Il est incroyable parce qu'il réalise quelque chose qui ne l'est pas moins : il te met face à ce qui dérange chez ce très cher être humain. De plus, il parvient à bousculer les limites de ce que tu peux habituellement attendre d'un métrage en tant que spectateur. Et c'est quelque chose, que l'expérience soit bonne ou mauvaise. Beaucoup y verront une énorme fumisterie, une œuvre sous héroïne aussi creuse qu'un chroniqueur de chez Hanouna. Personnellement je vais pas tenter d'enquiller les superlatifs mais juste dire qu'on est pas seulement devant du visuel sans rien au delà.


Ce même visuel est extrêmement présent, à vrai dire il dégueule de partout à coup de néons, de stroboscopes et d'ombres. Et pourtant le plus impressionnant ici ce n'est pas tant ce qu'on voit mais ce que la réalisation montre et ne montre pas. La caméra vogue entre les danseurs, s'attarde un temps sur une gueule, passe à une autre, balaye ainsi les décors et exécute un ballet plus que maîtrisé. On peut dire que c'est la maîtrise dans la confusion, la confusion dans la maîtrise. Est ce un peu pompeux comme façon d'expliquer ? Peut-être.


Toujours est il que si la tension monte crescendo, la réalisation a toujours un temps d'avance. Tout se passe encore bien qu'on tombe dans le bizarre sans réellement comprendre ce qui nous arrive. Puis à sa fin, le film dans son récit part totalement en sucette. Plus rien n'a de sens ni de gravité. Les corps se mélangent, à l'endroit à l'envers, se perdent entre les ombres et les halos vermillons. La confusion est totale mais quelle beauté !


Rendre belle la souffrance humaine, rendre...déjà rendre à l'écran la pulsion dans toute sa splendeur c'est...Dans le film c'est clairement du voyeurisme mais pas dans le côté glauque des choses. On participe au délire, le cœur bat bien fort sur un tempo saccadé et on accepte ce qui est montré. On est dans l'horreur : très bien, remets en une couche, chef. Pas de problème, encore une fois on accepte et on en redemande. Parce qu'au fond la haine est l'émotion la plus primaire chez l'homme avec la peur. Alors ça ne nous connaît que trop bien.


Dommage seulement que Climax soit un poil court (à mon goût). On sent néanmoins bien que Gaspar Noé s'est fait plaisir (et t'offres au passage quelques de ses références livresques et filmiques dans l'intro), qu'il s'est bien vidé l'appareil à penser et nous a pondu un truc dont il peut être fier à titre d'art. Voir un mec passionné comme ça c'est vraiment grisant.


Voilà, mot de la fin : grisant.

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le 27 sept. 2018

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Fosca

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