Volet central de la trilogie de la haine Cold Fish est aussi l'un des très bons films de l'Oeuvre prolifique - et pour le moins inégale - de Sono Sion. Situé entre le film-monstre Love Exposure et le sublime Guilty of Romance dans le fameux triptyque sus-cité Cold Fish fait figure d'étrange ballet d'ultra-violence déviant et jusqu’au-boutiste, épatant long métrage tout à fait symptomatique du malaise de la société nipponne contemporaine : misère sexuelle, cupidité et trafics interlopes, démantèlement familial...


Durant plus de deux heures nous suivrons la descente aux enfers d'un père de famille sans force de caractère ( Mitsuru Fukikoshi, impeccable de lâcheté et de violence contenue ), vendeur de poissons tropicaux de son état littéralement rejeté par sa fille et sa nouvelle femme ( Megumi Kagurazaka, sublime comme toujours...) qui va rapidement s'acoquiner - à son corps défendant - à un redoutable criminel spécialisé dans la dissolution organique du genre humain. Résultat : un choc graphique extrême et complètement délirant, allant du thriller familial tendancieux à la débauche gore et outrancière en passant par le film de yakuzas noir bien comme il faut...


On se surprend à penser aux idées ontologiques véhiculées par le chef d'oeuvre Straw Dogs au regard de Cold Fish : en effet les deux films présentent chacun à leur manière un protagoniste raisonnable et adepte de la non-violence, finalement acculé à la pire des barbaries au crépuscule du métrage... Toutefois le film de Sono Sion, malgré son caractère très brutal et dérangeant, lorgne davantage du côté du grotesque et de la pure re-présentation décomplexée, là où le film de Sam Peckinpah évitait toute forme de distanciation comique susceptible d'escamoter le choc.


Hénaurme cirque au coeur duquel le second degré prédomine Cold Fish s'avère remarquable dans sa mise en scène à la fois crasse et paradoxalement drôlement esthétisée, au gré d'une imagerie tour à tour criarde et délavée et d'un montage mêlé d'à-coups et de longues séquences alimentées par la haine et la perversité des personnages : personne - de fait - n'est épargné dans Cold Fish, film furax du terrible Sono Sion.

stebbins
8
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le 5 juin 2020

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