On met 25 minutes à apprendre le prénom de l'héroïne du film, Lena, et dans ce temps il passe à toute vitesse sur un des pires événements politiques du 20ème siècle.
Pour moi ce film commence au bout de trente minutes. Lena est en tenue stricte, elle avance dans un champs, longe une clôture et toque à une grande porte bleue. Avant ce moment il s'est passé quelques petits trucs, mais les personnages n'avaient aucune substance, rien d'important.
Lena entre, suis cette vieille allemande stricte et elle arrive devant Paul Schäfer.
Colonia est un film qui aurait dû commencer à ce moment-là, parce que Schäfer, l'ancien SS et criminel de guerre pédophile est le vrai visage du film, lui et ses amitiés avec le régime de Pinochet. D'un coup il devient omniprésent : sa voix, ses règles, ses idées réactionnaires. Lena se perd dans ce monde qu'elle ne maîtrise pas. Les moments se découpent en jours, anxiogènes, accompagnés des vrais plans, et peu à peu le monde souterrain se dévoile comme la réalité de la colonie.
Même si la réalisation est plate (elle donne parfois l'impression que Florian Gallenberger a juste posé sa caméra pour faire un truc), elle reste assez lisible et permet le récit. Elle ne l'accompagne pas, mais au moins elle le laisse respirer.
C'est peut-être un de ces problèmes récurrents dans les histoires "dont les faits sont réels" : cette difficulté à travailler le récit, à lui donner une portée supérieure.
Colonia n'y parvient à mon avis pas, mais il nous offre un incroyable monstre en échange et participe au devoir de mémoire sur la dictature chilienne. Je n'en demandais pas plus.