Comme des frères par Anna_M
Je l'attendais, ce film à la fois assez simple pour me garder concentrée en ces temps moroses et à la fois assez subtile pour ne pas me donner l'impression d'avoir payé 7 euros pour voir une niaiserie. Le voilà donc, mon film « baume au cœur » de la fin d'année, et il s'appelle Comme des frères. En gros, c'est l'histoire de 3 types qui décident de partir en vacances ensemble alors qu'a priori ce ne sont pas les meilleurs copains du monde. Ce qui les relie ? Ils sont tous très attachés à Charlie (Mélanie Thierry), décédée trois jours plus tôt des suites d'une maladie. Les trois compagnons de voyage, tous magnifiquement interprétés, ont des profils assez différents. Il y a d'abord Boris (François Xavier Demaison), chef d'entreprise quarantenaire a priori plus inspiré par la propreté de sa voiture de luxe que par ce périple corse improvisé. Il y a aussi Elie (Nicolas Duvauchelle), trentenaire cynique qui met son humour noir au service de l'écriture de sketchs pour la télévision. Il y a enfin Maxime, la vingtaine, idéaliste et naïf, dont la passion est de nourrir ses interlocuteurs d'anecdotes toutes plus hors contexte les unes que les autres. Le film suit donc les pérégrinations de ces trois compères : comment ils s'horripilent mutuellement, puis comment ils s'apprivoisent, se touchent, et se protègent. Commençons déjà par le dire, il y a des défauts. Pas mal de défauts même. Le premier étant à mes yeux le (seul vrai) personnage féminin du film. Mélanie Thierry campe ici le rôle d'une jeune trentenaire qui travaille dans le milieu théâtre. Son personnage, qui est quand même censé être le ciment du film, ne m'a à aucun moment émue. Elle ne nous touche pas, cette femme mystérieuse, un peu trop suffisante, un peu trop « clichée de la parisienne qui a tout réussi dans la vie et dans le milieu de la culture », et un peu trop idolâtrée par ses trois meilleurs amis. Elle semble être là pour faire la vitrine, représenter un idéal de femme forte et moderne, mais finalement on ne rentre jamais dans l'empathie avec cette fameuse Charlie (dont le prénom un peu original révèle déjà le manque de simplicité). Rien à faire, malgré tous les gros plans sur son sourire ultra naturel, malgré ses sanglots réprimés et malgré le vent dans ses cheveux, l'admiration béate que la caméra semble lui porter n'est pas contagieuse. Le personnage manque d'authenticité. Mais le problème vient bien du personnage et pas de l'actrice : Mélanie Thierry est loin d'être mauvaise dans son interprétation. Si l'on ne comprend pas l'admiration et l'affection que lui vouent ses trois amis (tous pour des raisons différentes), eux, par contre, réussissent à nous émouvoir. La façon dont ces trois hommes se découvrent peu à peu, s'acceptent avec leurs différences, se vannent avec bienveillance et piquant, est réellement touchante. C'est là que la sauce prend. On rit à gorge déployée face à cet humour finalement très humain. Entre humour noir, comique de situation et comique de caractère, chaque spectateur risque d'y trouver son compte. Car ces hommes et leurs humours respectifs ont beau représenter trois profils clichés, ils les représentent extrêmement bien. Et les situations qu'ils traversent ont beau être assez prévisibles, elles sont bien amenées. La complicité des personnages (et des acteurs ?) transperce l'écran, et leur amitié brille comme un hymne à la tolérance. Finalement, on occulte presque totalement la raison première de leur voyage -Charlie- pour se concentrer sur leur relation, à eux trois. Cette relation est pleine de symboles, et les flashbacks nous aident progressivement à comprendre tous les clins d’œils du film, comme si on reconstituait peu à peu le puzzle de leur amitié. Entre deux blagues, on est ému (mais on n'essaie jamais pour autant de nous arracher des larmes), tant par les trajectoires et les sensibilités de ces trois hommes que par la violence symbolique de certaines scènes. Finalement, oui, ces trois-là sont "Comme des frères". Et quand la fin arrive, on est requinqué. On a envie de retrouver nos amis, avec tout ce qu'ils ont d'énervant, de drôle, de différent. On a envie de s'amuser, entre pudiques et extravertis, entre instinctifs et réfléchis, entre cyniques et idéalistes, entre sentimentaux et forteresses. Entre gens qui ne ressemblent pas, en fait.