Comme un avion plane allègrement entre drame existentiel et comédie légère, avec pour ligne d’horizon un objectif audacieux : dépeindre la nature humaine épurée de tout artifice. Il est rare de se retrouver devant ce genre de petit film qui parvient à vous faire changer d’avis aussi radicalement en court de route, au point de terminer la séance plutôt ému, et admiratif devant l’état de grâce atteint par le final alors que la première demi-heure annonçait une tranche de vie un peu balourde.


On devine, après quelques coups de pagaie, que le périple en Kayak entrepris par le brave Michel, fidèle travailleur fatigué par sa routine, en vue de renouer avec l’onirisme de son enfance, importe assez peu à Bruno Podalydès. Plus que la cause du retour à la terre de son personnage, c’est la démarche en elle-même, lorsqu’elle s’initie, qui l’intéresse. Comme un avion déploie en effet ses ailes au moment où le cinéaste peut enfin sentir le chêne qui constitue son nouveau destrier, pour quitter la piste de manière définitive lorsqu’il effleure le bras de rivière qu’il ne quittera plus de la séance.


Dès lors, le numéro de voltige peut démarrer. Par un panel très large d’émotions en tout genre, qu’illustre Bruno Polydades en se mettant lui-même en scène, imaginant ses rencontres avec différents personnages, l’homme joue la carte du naturel avec un aplomb certain et une belle sensibilité à croquer l'humain et ses fêlures sans tomber dans la démonstration lourde et simpliste. Agnes Jaoui trouve la note juste pour finir de porter le film dans les contrées rarement foulées d’un réalisme simple qui frôle l’évidence.


Dès lors cette nature qu’il manque pourtant de sublimer se range aux côtés de Bruno Polydades pour ôter l’inutile aux personnages qui la foulent du pied : de l’acteur/réalisateur aux différents comédiens qui y deviennent ses acolytes, tous semblent suivre le cours du fleuve sans être influencés par une vie passée qui n’est qu’évocation trouble, ou un futur proche que l’on devine positif alors qu’il ne se dessine pourtant pas de cette façon : le pauvre homme quitte le monde fantasmé de son enfance, celui qui le sécurisait, pour enfin affronter la vérité.

oso
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le 27 déc. 2015

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