Conan, qu'il y a t-il de mieux dans la vie ?

L’Heroïc Fantasy et ses dérivés est un de ces genres littéraires inépuisables, possédant ses dieux vivants, écrivains de renom, ses œuvres de référence, ses héros et univers variés.
Cependant, sur grand écran, le constat n’est pas le même, et les films de fantasy, il n’y en a pas tant que ça, et des bons films de fantasy, il y en a encore moins...
Et puis il y a Conan le Barbare.


Conan le Barbare, de John Milius, est (à l’image de Blade Runner dans le registre de la SF) un film à voir au moins deux fois pour un spectateur de ma génération, baigné dans les productions dantesques et épiques comme la trilogie du Seigneur des Anneaux. Au premier abord, Conan a vieillit, Conan est long, Conan est mou, bien loin du spectacle et de l’esthétique de ses propres rejetons. Un second visionnage s’impose plus tard, lorsqu’on a mûri, recontextualisé le film dans son époque et surtout lorsqu’on cherche autre chose que le divertissement explosif et les scènes d’action à gogo, lorsqu’on cherche l’âme d’un film.
Et au deuxième essai, le constat est bien différend, Conan est puissant, Conan est intemporel, Conan est magique.


Inspiré des écrits de Robert E. Howard, Conan commence avec du Nietzsche, Ce qui ne tue pas rend plus fort. Citation mythique et reflet de Conan, notre héros, dont le père, la mère, le peuple a été décimé, dont la majeure partie de la vie a été en tant qu’esclave, en tant que gladiateur, en tant qu’animal ou plus bas encore. Conan, c’est l’archétype même du héros d’heroïc fantasy à l’extrême, le surhomme, un genre de self made man bodybuildé, celui qui a tellement vécu, qui a baigné dans une constante barbarie, survécu à d’innombrables souffrances et épreuves pour au final n’en devenir pas moins vivant mais toujours plus fort.


Conan, c’est une des plus belles bandes originales jamais composées pour un film, qui donne une dimension supplémentaire à la dramaturgie et la tragédie présente presque tout au long du long métrage. Cette B.O., composée par Basil Poledouris, est épique, sublime, transcende les scènes phares du long métrage et même en dehors du film, reste un pur bonheur à écouter et à re-écouter.


Conan, c’est un univers sauvage et violent à l’image de son personnage principal, à un âge indéterminé (l’âge hyborien), où les voleurs et les barbares deviennent les héros, où la différence entre le bien et le mal n’est pas d’actualité. Au contraire des films du même registre, Conan le Barbare n’est pas naïf ni manichéen dans son propos et dans le monde qu’il décrit, ce qui fait de lui une œuvre à part dans la fantasy, poignante et bien plus réaliste que la quasi majorité des films du même genre dont il est en même temps le fer de lance et un outsider intemporel à sa propre identité.
L’univers présenté ici est renforcé par la mise en scène soignée de Milius et ces paysages sauvages, ces terres arides et desséchées bien loin des traditionnels paradis visuels décrits au sein de la plupart des œuvres reconnues dans le domaine de l’heroïc fantasy.


Conan, c’est un casting correct sur tous les points, dont une paire d’acteurs qui restera à jamais gravée dans les mémoires, le tandem Arnold Schwarzenegger/James Earl Jones. Tandis que le second interprétera l’un des méchants les plus emblématiques de son genre, un gourou fanatique, un messie aux répliques philosophiques et à la voix aussi imposante que sa prestance et son jeu d’acteur, le premier deviendra l’action star que l’on connaît tous. Conan le Barbare est en effet pour notre Chêne Autrichien le pilier indétrônable de sa carrière sur grand écran et sa notoriété internationale, le film qui va populariser cette image du héros à la musculature impressionnante et invincible que l'on retrouvera dans toute une tripotée de films durant la décennie 1980, et l’une des œuvres de sa doublette magique avec Terminator.
Duo impeccable renforcé par des seconds rôles intéressants, dont Gerry López, archétype du bras droit, de l'ami fidèle du héros. Mais surtout une Sandahl Bergman dont on retiendra une prestation dépeignant un beau portrait de femme, loin du sexisme du remake de 2011. Amazone aguerrie, douce et dure à la fois, capable de rivaliser au combat avec ses homologues masculins dans ce monde dominé par la rage et la violence, et tout aussi capable de faire le sacrifice ultime pour l’homme qu’elle aime, peut être la plus belle preuve d’humanité au sein de ce film sombre et pessimiste à l'univers où la brutalité semble la seule issue pour survivre.


Conan, c’est l’une des références de l’heroïc fantasy au cinéma, un savant mélange d’aventure et d’action ponctué de dramaturgie et de tragédie, le fer de lance d’un genre sous exploité jusqu’alors et en même temps une entité à part dans son propre style de par son aura, son authenticité.
Il est vraiment dommage que ces aspects qui font de Conan le Barbare une œuvre phare ayant donné ses lettres de noblesse à la fantasy, une aventure riche en poésie et en émotions, et tout simplement un monument du cinéma n’ont pas été réutilisés dans les opus suivants et rarement respectés au sein du genre en général...enfin jusqu’en 2001, où Peter Jackson accouchera de sa sainte trilogie et redonnera une seconde vie au genre.


Alors je répète ma question, Conan, qu’il y a t-il de mieux dans la vie ? Si vous ne le savez pas, que Crom ai pitié de vous, et foncez voir Conan le Barbare !

Créée

le 3 juin 2018

Critique lue 153 fois

Tom Bombadil

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