Il y a trois ans à la fin du premier Conjuring le spectateur était tout à fait partant pour découvrir d’autres enquêtes paranormales du couple Warren évoquées par les mystérieux items aperçus dans leur musée privé, à la condition qu’elles soient réalisées avec autant de brio. Par chance malgré le succès du film la Warner n’a pas pressé la mise en chantier d’une suite permettant ainsi à James Wan (après son détour par la franchise Fast & Furious) et l’équipe scénaristique Carey Hayes, Chad Hayes de renforcée de David Leslie Johnson (Esther) de rempiler pour nous offrir une suite digne de l’original. Cette patience s’est avéré payante car Conjuring 2 fait partie des (rares) suites réussies de film d’horreur qui parviennent à surenchérir dans les moments de terreurs sans perdre de vue ce qui fit la réussite du premier film.


Conjuring 2 commence in-media res par un pré-générique qui place le spectateur au beau milieu d’une intervention de notre couple d’exorcistes (comme dans les James Bond) qui participent à une séance de spiritisme dans la maison hantée la plus connue de l’histoire (et du cinéma) américaine : Amytiville dont on reconnait les fenêtres si particulières. Durant cette séance Lorraine Warren (Vera Farmiga à nouveau excellente) est assaillie par une vision de l’entité maléfique qui a fait fuir les propriétaires actuels et poussé le précédent à massacrer sa famille. L’esprit maléfique qui lui apparaît sous la forme d’une nonne monstrueuse lui montre la mort de son mari Ed (Patrick Wilson). Traumatisée par cette vision et échaudée par les médias qui les traitent de charlatans, elle demande à son mari d’abandonner leurs investigations. Mais bientôt l’Eglise Américaine leur demande de se rendre en Angleterre pour déterminer l’authenticité du cas de Peggy Hodgson (Frances O’Connor) une mère célibataire de cinq enfants qui pense que sa maison d’Enfield dans le nord de Londres est hantée. Sur les lieux pourtant Lorraine ne perçoit aucune présence mais quand Janet (Madison Wolfe) la plus jeune de ses filles montre des signes de possession démoniaque les Warrens doivent intervenir malgré ses réticences.


Ce qui distingue les Conjuring de la production fantastique actuelle marquée par des productions à petits budgets, comme celle de la société Blumhouse (pour laquelle James Wan a signé un des plus gros succès avec Insidious) c’est qu’ils bénéficient d’un budget conséquent et de la même attention qu’un film de studio « classique ». Avant même l’intervention des Warrens on passe beaucoup de temps auprès de la famille Hogson : Peggy la mère qui lutte pour élever ses cinq enfants dans l’Angleterre thatchérienne, Janet la plus sensible de ses filles, Billy atteint de bégaiement. La solidarité de cette famille nous la rend immédiatement sympathique et fait ressentir avec d’autant plus de force les manifestations qui les frappent. Sa durée de deux heures quatorze (exceptionnelle pour un film d’horreur) lui permet de développer ses personnages et de construire d’incidents en incidents une tension qui se libère de façon spectaculaire lors d’un climax d’autant plus efficace que Wan a pris son temps pour installer ses séquences de terreur. Le terme de « jump scare » (procédé consistant à faire sursauter le spectateur) est souvent employé de manière péjorative mais le réalisateur d’origine malaisienne en joue ici en virtuose les calibrant avec une précision scientifique dans ce décor de maison hantée, décor dont il fait son laboratoire, en contrôlant chaque détail de décoration, chaque ombre. Ses personnages et le spectateur lui-même se partageant le rôle de cobayes. Sa maitrise de la géographie de l’action, sa caméra fluide et un design sonore agressif fait de Conjuring 2 le train fantôme idéal.


L’atmosphère du film est plus ouvertement fantastique que le premier volet, abandonnant rapidement la suggestion pour la visualisation de l’entité démoniaque qui prend pas moins de trois formes différents dont le Crooked man un boogeyman au design très réussi. Le style visuel est aussi plus baroque et les images du nouveau directeur de la photo Don Burgess (Spider-man, Forrest Gump) colle à cette nouvelle orientation. Mais Conjuring 2 conserve ce qui faisait pour moi la force de l’original le lien authentique qui unit les époux Warren, leur foi au premier degré qui les distingue dans un genre souvent parasité par l’ironie. L’interprétation naturelle du couple Patrick Wilson-Vera Farmiga rend touchante une scène ou Ed tente de réconforter les enfants Hodgson en jouant à la guitare un morceau d’Elvis Presley qui aurait pu sombrer dans la mièvrerie. Mais le script est malin car il place les Warrens pourtant complètement convaincus de l’existence du surnaturel dans la position de douter des Hogson et de leur refuser leur aide.


Comme pour le premier volet Wilson et Farmiga sont entourés d’un casting très convaincant que ce soit Frances O’connor (A.I) parfaite en mère courage, Simon McBurney (Le Dernier Roi d’Écosse) qui parvient à se montrer touchant dans le rôle d’un spécialiste britannique du paranormal et bien sur la jeune Madison Wolfe (Trumbo, Joy) dans le rôle de Janet cible principale du démon qui porte une grosse partie du film sur ses jeunes épaules.


Conclusion : Ride de terreur ultra-efficace Conjuring 2 est l’exemple parfait d’une suite totalement satisfaisante grâce à la virtuosité de la mise en scène de James Wan qui confirme son rang de nouveau grand du fantastique au service d’une histoire qui gère ses personnages avec sensibilité.

PatriceSteibel
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2016

Créée

le 1 juil. 2016

Critique lue 254 fois

PatriceSteibel

Écrit par

Critique lue 254 fois

D'autres avis sur Conjuring 2 - Le Cas Enfield

Conjuring 2 - Le Cas Enfield
Behind_the_Mask
7

Croire est un acte de foies

A première vue, Le Cas Enfield est un exact décalque de son aîné, Les Dossiers Warren, en ce qu'il a la même propension, pour entamer les débats, à vous envoyer une scène choc à la tête tirée d'une...

le 4 juil. 2016

45 j'aime

2

Conjuring 2 - Le Cas Enfield
Antoine3
7

James Wan il soulève tout seul le cinéma d'horreur

Franchement les mecs faut arrêter vos conneries, à tout le temps vous plaindre et à jamais être satisfait. Wan c'est le seul gars qui relève un peu le niveau du cinéma d'horreur à l'heure actuelle ...

le 17 juin 2016

41 j'aime

30

Conjuring 2 - Le Cas Enfield
xGh0st
8

« Le mal, c’est la soudaine bascule du quotidien dans l’horreur. » Simonetta Greggio

J'attendais The Conjuring 2 avec une très grande impatience. Le premier film m'avait conquis et marqué, de plus James Wan (Dead Silence) est l'un des seuls réalisateurs de films d'horreur a encore...

le 30 juin 2016

38 j'aime

4

Du même critique

Le Fondateur
PatriceSteibel
8

Ça s'est passé comme ça chez McDonald's

Parfois classicisme n’est pas un gros mot , Le Fondateur en est le parfait exemple. Le film , qui raconte l’histoire du fondateur de l’empire du fast food McDonalds, Ray Kroc interprété par Michael...

le 26 nov. 2016

58 j'aime

1

Star Wars - L'Ascension de Skywalker
PatriceSteibel
6

Critique de Star Wars - L'Ascension de Skywalker par PatriceSteibel

Depuis la dernière fois où J.J Abrams a pris les commandes d’un Star Wars il y a un grand trouble dans la Force. Gareth Edwards mis sous tutelle sur la fin du tournage de Rogue One, après une...

le 18 déc. 2019

41 j'aime

7

7 Psychopathes
PatriceSteibel
8

Une réjouissante réunion de dingues (et de grands acteurs)

Avec ce genre de comédie noire déjanté et un tel casting j'apprehendais un film ou le délire masquerait l'absence d'histoire et ou les acteurs cabotineraient en roue libre. Heureusement le...

le 5 déc. 2012

36 j'aime

9