La première partie du dernier Blier est, à mon grand étonnement, vraiment enthousiasmante. Deux personnages, ces deux monstres que sont Clavier et Depardieu (absolument prodigieux de bout en bout), évoluent dans un décor vide et froid, qui rappelle le meilleur de Buffet Froid, et ils sont tributaires d'un scénario qu'ils se doivent de suivre et qu'on leur remet peu à peu, allant d'une scène à l'autre sans savoir ce qui leur attend. Théoriquement ça tient la route et c'est même passionnant. Blier fait du Blier, mêlant sans cesse la diégèse à l'extradiégétique et parvient à dire des choses pertinentes sur la vieillesse, la mort, le cinéma, tout en construisant un imbroglio théorique vraiment réjouissant. Bref, Blier revenu au meilleur de sa forme, ça semblait totalement impossible. Il faut dire que ça doit énormément aux comédiens. Clavier (que j'ai toujours défendu en tant qu'acteur) et Depardieu sont absolument prodigieux, démentiels, et sont pour beaucoup dans la réussite du projet. Mais tous les seconds rôles sont incroyables également, je pense notamment à Guy Marchand, magnifique, mais à tous les autres, prouvant qu'on peut avoir des bons comédiens en France s'ils sont bien dirigés, et surtout que Blier est un formidable directeur d'acteurs. Malheureusement la sauce retombe un peu vers le milieu de ce film très court (1h19 générique compris, j'admire que Blier sache faire court sur un film comme ça, un peu à la manière des films de Dupieux, très courts aussi généralement, dont Blier est le mentor évident), comme si le cinéaste ne savait pas dans quelle direction partir pour achever son film. C'est à la fois frustrant et réjouissant donc.