Grâce à un simple cube qu'il multiplie à l'infini, Vincenzo Natali réussit un suspense claustrophobe angoissant.
Enfin un cinéaste qui remet au goût du jour la peur sans se moquer du monde. On est très loin des psychoses adolescentes de Sieur Kevin Williamson ou de l'imposture de l'été, à savoir le médiocre « Blair Witch Project ». D'emblée le Vincenzo Natali nous plonge dans une ambiance effrayante.
Un homme habillé de noir pénètre dans une cellule en forme de cube. Il s'avance au milieu de la pièce. Et là, le titre vient littéralement déchirer l'image. Le spectateur sursaute et se tient prêt à ce qui va suivre. Après un très court générique, on retrouve dans un cube identique mais de couleur différente, cinq personnages qui semblent se réveiller d'un véritable cauchemar. Aucun d'eux ne comprend comment est pourquoi il est arrivé là. Il y a un roi de l'évasion, un policier, une mathématicienne, un architecte et une psychologue. Ensemble ils décident de survivre en passant d'un cube à l'autre, mais certains sont mortellement piégés. C'est là que leurs métiers respectifs interviennent. Grâce à leurs connaissances et leurs expériences individuelles, ils s'en sortent plus ou moins bien. L'un d'entre eux disparaît rapidement, mais est remplacé par un nouveau qu'ils retrouvent prostré dans un coin de l'une de ces prisons maléfiques.
Avec trois fois rien, comme les deux escrocs de « Blair Witch Project », Vincenzo Natali remonte directement aux peurs ancestrales de l'être humain : comment sommes nous arrivés au monde et surtout pourquoi. Mais le cinéaste fait bien attention à ne donner aucune réponse précise. Il se contente de capter les réactions de ses personnages au moment même où ils ressentent telle ou telle frayeur. Avec simplement deux décors (un cube fixe et un autre doté de parois mobiles) et un changement radical d'éclairage, le jeune prodige issu de l'école de cinéma canadienne parrainée par Norman Jewinson (« Roller Ball, « Jesus Christ Superstar », « Agnès de Dieu ») parvient à créer l'illusion d'un véritable labyrinthe de cubes formant une petite planète cubique. Il utilise aussi très intelligemment de remarquables effets spéciaux pour matérialiser les pièges des cellules.
Il prend le temps de poser chacune de ses scènes comme des actes théâtraux. Ils donnent ainsi au spectateur le droit de participer à l'ensemble de l'action. Il ne joue pas sur les hors champs. L'angoisse fait partie intégrante de l'écran sans ne jamais sortir de son cadre. La musique, très peu présente mais utilisée à des endroits très judicieux, accentue encore cette impressionnante sensation d'enfermement. Son scénario très écrit suit une ligne parfaitement implacable et inévitable.
Pour le seconder dans cette étonnante entreprise, il s'est entouré de comédiens parfaitement en phases avec leurs rôles. Chacun représente un caractère très défini avec beaucoup de crédibilité.
Il est d'ailleurs réjouissant de constater que cette subtile première œuvre a été plébiscitée de par le monde, remportant le Prix du Meilleur Premier Film Canadien en 1998 et les Prix « Première » du Public, Prix de la Critique et Grand Prix au Festival de Gerardmer Fantastic'Arts de cette année.