C'est l'histoire vraie de Ron Woodroof, un gros connard, hétérosexuel, homophobe, qui se découvre porteur du VIH. Nous sommes en 1986, c'est une maladie de pédés. Les thérapies sont balbutiantes, mais les laboratoires pharmaceutiques et la FDA s'entendent déjà sur les médicaments à autoriser ou pas. Woodroof veut vivre. Les 30 jours de survie qu'on lui pronostique ne lui conviennent pas. Il va trouver au Mexique les moyens de se maintenir en vie, et par ricochet, aider d'autres malades.

On pourrait en rester là. Tout l'intérêt de Dallas buyers club, si intérêt il y a, se résume à cela, des faits réels, le parcours atypique de ce connard de Woodroof. On apprend des trucs, c'est sûr, mais allons-nous vraiment au cinéma pour apprendre des trucs ? Ou plutôt, est-ce primordial ? Va-t-on voir la rétrospective Braque pour apprendre des trucs, ou pour s'émouvoir devant de belles œuvres ?

Après le réussi C.R.A.Z.Y. et le calamiteux Café de flore, Jean-Marc Vallée nous livre un film à l'encéphalogramme plat, aussi lisse et ennuyeux qu'un exposé de collégien. D'ailleurs le scénario aurait très bien pu être écrit par un élève de troisième à l'aide de fiches Wikipedia. Succession de scènes signifiantes, affreusement didactique, parsemé d'inévitables "moments forts", Woodroof rejeté, Woodroof gayfriendly au supermarché, l'accolade virile entre Woodroof et Rayon, etc. Tout est convenu, attendu, sans saveur.

La seule qualité du film est d'éviter tout pathos. Il est vrai qu'avec un héros aussi antipathique, cela aurait été un tour de force. Seul le personnage de Rayon est touchant, mais on le voit peu. En vérité, Dallas buyers club souffre d'une totale absence de point de vue cinématographique, tant dans sa mise en scène que dans sa narration. La réalisation est fade et le scénario scolaire.

Et les acteurs alors ? Et les kilos en moins ? Matthew McConaughey se la joue Christian Bale dans The machinist, et alors ? C'est ça qu'il faut saluer ? Heureusement, non. McConaughey est bon, même si l'on s'étonne de quelques invraisemblances de style [comment un tel redneck peut-il se transformer en prêtre civilisé ou en homme d'affaire international aussi facilement ?]. En plus, on l'a vu mieux ailleurs, dans Mud ou Killer Joe, par exemple. Jared Leto aussi a perdu des kilos, mais on en parle moins. On parle de son "incroyable performance" dans le rôle d'un travesti. C'est incroyable de jouer un travesti ? Jared Leto est très bon et compose un personnage très émouvant. C'est lui qui porte le peu d'émotion du film. C'est ça qu'il faut souligner.

Pur film à Oscars, déroulé scolaire à l'édifiance portée en étendard, ennuyeux de bout en bout, Dallas buyers club n'a finalement pas grand chose à voir avec le cinéma.
pierreAfeu
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le 5 févr. 2014

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