Pour les adeptes de destin hors norme...

Matthew McConaughey m’est toujours apparu sympathique depuis que je l’ai découvert dans le léger et divertissant « En direct sur Ed TV ». Depuis, sa carrière n’a pas suivi un chemin rectiligne et tous ses rôles n’ont pas marqué positivement le septième art. Néanmoins, ces dernières années, l’acteur s’offre une seconde vie sur les écrans. Dans des genres très différents, ses prestations dans « Mud – Sur les rives du Mississipi » et « Magic Mike » ont été unanimement reconnues. Le début d’année a prolongé cet état de grâce avec l’apparition de la première saison de « True Detective » et la sortie en salle de « Dallas Buyers Club ». Sa performance dans ce dernier film a été récompensée d’un Oscar du meilleur acteur en février dernier.

C’est avec enthousiasme et curiosité que j’ai décidé d’aller voir cet opus réalisé par Jean-Marc Vallée et sorti le vingt- neuf janvier dernier. D’une durée de deux heures, il nous conte l’histoire vraie de Ron Woodroof, victime du SIDA dans les années quatre-vingts. Les projets de biopic n’accouchent pas toujours de chef d’œuvre. Mais le fait le personnage central du film soit inconnu pour bon nombre de spectateurs ne contraignait pas le scénariste à subir des passages narratifs obligatoires car célèbres et symboliques.

Le site Allociné propose le synopsis suivant : « 1986, Dallas, Texas, une histoire vraie. Ron Woodroof a 35 ans, des bottes, un Stetson, c’est un cow-boy, un vrai. Sa vie : sexe, drogue et rodéo. Tout bascule quand, diagnostiqué séropositif, il lui reste 30 jours à vivre. Révolté par l’impuissance du corps médical, il recourt à des traitements alternatifs non officiels. Au fil du temps, il rassemble d’autres malades en quête de guérison : le Dallas Buyers Club est né. Mais son succès gêne, Ron doit s’engager dans une bataille contre les laboratoires et les autorités fédérales. C’est son combat pour une nouvelle cause… et pour sa propre vie. »

L’histoire se construit autour du personnage de Ron. Dès les premières images, il nous est présenté comme un beauf machiste, drogué, homophobe et dont la finesse n’est pas la qualité première. Néanmoins, malgré ses nombreux défauts, il dégage un charisme et une aura qui le rend finalement attachant. Le talent de son interprète n’est pas étranger à ce sentiment. L’ouragan qui vient bouleverser sa vie fait son apparition très vite. Il apprend qu’il est séropositif. Nous sommes en 1986. L’espoir n’existe pas. La mort sera rapide. La douleur et la colère du malade est complexe. En effet, la peur de mourir cohabite avec le fait d’être associé à une « maladie de PD ». Cette souffrance transpire de l’écran et m’a touché malgré les incohérences et l’absurdité choquante de certains propos du personnage principal.

La mise en place des jalons de l’intrigue est remarquable. Immédiatement, je me suis senti plongé dans la vie de Ron et pleinement impliqué dans son destin tragique. Le film transcrit bien la force qui habite le personnage principal. Il refuse de se laisser abattre et est prêt à tout pour survivre. L’histoire entre alors dans sa deuxième phase durant laquelle Ron découvre que des médecines alternatives permettraient de prolonger l’espérance de vie des personnages atteintes du VIH. La notion d’énergie du désespoir prend alors tout son sens.

Rapidement, il se rend compte que les produits coûtent chers et demandent une logistique sérieuse. Ils sont en effet interdits aux Etats-Unis car non homologués par les instances médicales. Il décide alors de mettre en place une structure visant à vendre ces médicaments à d’autres malades afin de financer sa propre médication. Ainsi est né le Dallas Buyers Club. Le souci pour Ron est que l’essentiel de sa clientèle se compose d’homosexuels qu’ils méprisent au plus haut point. C’est ainsi que sa survie dépend de personnes qu’ils considèrent jusqu’alors comme des sous-hommes. C’est aussi ici que naît son amitié complexe, riche et émouvante avec Rayon, un transsexuel séropositif. Leur relation est un des atouts indéniables du film. A aucun moment elle ne tombe dans le pathos ou l’excès mais à tout moment, j’ai été touché par ses deux personnes que seule une mort promise a su rapprocher. La performance de Jared Leto et Matthew Mc Conaughey est un modèle du genre et m’a marqué pour longtemps en tant que spectateur…

En montant sa petite entreprise dans sa chambre d’hôtel, Ron fait naître une micro société aux abords de ce motel. Les « clients » se multiplient et Woodroof devient à la fois vendeur et médecin du fait de sa gestion individualisée des prescriptions. Cela permet à bon nombre de seconds rôles d’exister participant ainsi à la crédibilité de l’ensemble. Comme souvent dans les films américains, chaque protagoniste aussi bénin soit il était brillamment interprété. Tout apparaît réel et aucune situation de malade ne nous laisse indifférent. On s’attache à chaque petite bribe d’espoir et on s’effondre quand les mauvaises et irrémédiables nouvelles s’enchainent.

Le film n’est pas caricatural dans l’opposition entre médecine traditionnelle et méthodes alternative. En effet, Ron crée un lien fort avec la doctoresse locale qui gère les malades à l’hôpital. Cette dernière est interprétée par Jennifer Garner qui, tout en sobriété et retenue, déclenche une véritable empathie à son égard. Elle est tiraillée entre son administration dans laquelle elle veut croire et les progrès qui semblent découler du commerce de Ron. Son personnage, bien qu’en retrait de Woodroof et Rayon, est indispensable à la réussite du film. Par contre, les industries pharmaceutiques et les grandes instances d’éthique médicale ne sortent pas grandies loin de là.

Pour conclure, cet opus est un petit bijou. Je l’ai trouvé en tout point remarquable. Le personnage principal, les protagonistes secondaires, l’atmosphère, les décors, les dialogues… Rien n’est à jeter. De plus, tout au long des deux heures, les émotions se succèdent à un rythme effréné et ne nous laissent indemnes à aucun moment. Je ne peux que vous conseiller de guetter un futur passage de cet opus à la télévision. Vous ne regretterez pas le voyage…
Eric17
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le 22 juin 2014

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Eric17

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