Germain Germain, prof de français presque conservateur, demande à ses secondes de raconter leurs weekends. De son point de vue, les "apprenants" écrivent mal, ne racontent rien. Et comble du malheur pour l'admirateur de Flaubert, truffent leurs productions de fautes d'orthographe. Il n'en fallait pas plus pour qu'il se laisse séduire par le texte de Claude Garcia, élève discret dont il gratifie le travail par un 17. M. Germain en redemande, et propose à son élève de prolonger l'expérience d'écriture. Cet enseignant s'investit-il un peu trop ?

On passera sur le soin, toujours apporté, au casting et aux décors (proches d'Edward Hopper, pour la forme, pour la tendresse du regard sur la classe moyenne).
On passera sur la "géographie Ozienne" qui installe toujours les personnages dans une ville utopique. Une cartographie qui se rapproche très près (j'imagine) des rêves de la middle class. Ces gens qui sont heureux quand leur champ de vision, en terrasse, se compose d'arbres et de bancs plantés régulièrement sur une pelouse toujours verte.

Mais, on NE passera PAS sur l'écriture. La force du scénario qui manque tant, d'ordinaire, aux productions françaises, est d'une profondeur magistrale et d'une minutie réglée. Une mise en abyme exemplaire. Alors, bien sûr, il est l'adaptation par Ozon du "Garçon du Dernier Rang", pièce de Mayorga. Il a réussi l'adaptation en déplaçant l'action dans sa propre géographie, dans son espace de confort. Je précise...

Le personnage du professeur, maître en écriture, influence son élève et influence l'action (le film dans le film). Le professeur Germain se permet même de souligner les faiblesses de l'écriture de Claude, donne des leçons de dramaturgie, évalue l'action au point de la déplacer. Jusqu'à ce que les personnages spectateurs/voyeurs (Luchini, Scott Thomas) se retrouvent pris dans les rouages de l'action dont ils se délectaient.
Au passage, on soulignera l'intelligence de l'affiche qui place les personnages dans leur rôle (spectateur, voyeurs, acteurs) et qui place l'action dans une famille de cinéma, dans une époque, celle des scénaristes américains virtuoses. On pense à Hitchcock.

Tous ces éléments, le scénario en tête, est un bonbon pour les amateurs de scénarii. Alors, quand une référence à Fenêtre sur Cour se glisse (avec une certaine lourdeur), on se laisse dire qu'Ozon sait rendre hommage à ses maîtres.
arnorien
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le 3 oct. 2012

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le 3 oct. 2012

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