Le pouvoir dont abuse le parent quand il profite de la confiance de son enfant. Ce pouvoir, incompréhensible pour l'enfant abusé, est remplacé par la grandeur du pouvoir de Neve, qui fait arriver des choses incompréhensibles aux adultes. Des choses que eux ne veulent pas voir et préfèrent les remplacer par une perception naïve de l'enfant : "ça ne peut pas arriver, l'enfant doit en être responsable". C'est ainsi que l'enfant abusé souligne les choses, là où il ne comprend pas, là où impuissant les événements se déroulent sous ses yeux. L'abus de pouvoir des parents est matérialisé par le pouvoir de Neve. C'est une transcription, dans le monde des adultes, de ce qui se passe pour un enfant quand il voit la souffrance qui lui arrive. Les plans qui partent de l'extérieur-paysage et se ramènent à des objets très proches au premier plan. Neve cherche la réponse dans le paysage (le feuillage, les environs, loin...) mais ne se trouve avoir prise que sur les objets proches, les seuls qu'elle peut accrocher. Le monde n'est pas quotidien ou naturel pour elle : elle voit bouger les choses de manière apparemment désordonnée trop près d'elle,"sans" elle. Leur seul point commun est qu'elle aboutisse à "faire mal". Elle transfère sur les objets son réel, car les gestes volontairement ambivalents de ses parents ("fais nous confiance", "fais moi la bise", "tout va bien se passer") empêchent d'associer quoique ce soit de réel entre les mots et les intentions/sentiments des parents. Elle ne peut pas savoir, elle ne peut pas se fier aux mots qu'elle entend, la seule attitude en réaction est la méfiance. Le sens des choses n'existe pas, les seules associations existantes sont reliées à la souffrance, unique vérité par laquelle elle communique : le cri des enfants, magnifiques scènes où elle siffle pour appeler le cri des enfants souffrants. La dernière scène : rituel de sacrifice/reproduction de la destruction de l'innocence. Cette scène ne représente pas une vengeance (elle est perçue comme telle seulement par un adulte). Comme dans certains rituels, elle choisit une personne innocente et la sacrifie au nom de toutes les victimes, comme pour guider la voie de la nature, pour que la chose ne se reproduise pas, pour qu'il n'y ait plus de place dans le monde pour les accueillir. La mère avait déjà des aperçus via les cris qu'elle entendait aussi quand Neve appelait/criait a l'intérieur. Neve est rongée par la souffrance et ne s'en est pas tiré, cf. dernière image avec ses larmes de sang. Le film se veut intransigeant : il ne peut y avoir de place pour un "à la fin, malgré tout ce qu'elle a subi, elle s'en sort". Les enfants trouvent avec Neve une justice aussi arbitraire que celle qu'ils ont subi, la seule qu'ils ont pu calquer sur les gestes abusifs des parents.

zerthol
7
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le 23 avr. 2018

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