Je vais vous avouer quelque chose. Moi, le cinéma de zombies, c'est pas ma tasse de thé. Pourtant je n'ai rien contre les zombies, au contraire, malheureusement je n'accroche pas tant que ça au genre. Et malgré ça je n'ai pas réussi à passer à côté de ce Dernier train pour Busan, film qui a bien fait parler de lui au Festival de Cannes, et qui m'intriguait pas mal, notamment le fait qu'il semblait se dérouler quasi exclusivement en train.


Après une petite exposition du personnage principal d'environ 10 minutes, elle-même précédée d'une introduction où l'on voit que le virus commence déjà à faire son effet sur une pauvre biche écrasée, on monte dans le train, et il se déroule des événements on ne peut plus banals, jusqu'à ce qu'une fille mordue et infectée monte à bord. Quand le virus fait son effet sur la pauvre demoiselle, c'est la panique dans le train et le chaos règne. Le train ne s'arrêtera plus avant d'arriver à Busan, la terre promise, et les passagers vont devoir tenter par tous les moyens de survivre à une vague de zombies toujours plus grandissante.


Autant le dire tout de suite, dans le fond, Dernier train pour Busan n'est probablement pas le plus révolutionnaire des films de zombies. Il y a des petits clichés inévitables ça et là... Le personnage principal est un père de famille surbooké par son travail et passant trop peu de temps avec sa fille (dont c'est l'anniversaire qui plus est) qui a envie de rejoindre sa mère, on y retrouve aussi quelques mécaniques scénaristiques assez habituelles... Et pourtant, le film fonctionne là où ça aurait pu échouer lamentablement. Les personnages sont stéréotypés mais intelligemment dirigés, leur volonté de survivre se ressent bien, on a envie qu'ils s'en sortent, ils se serrent les coudes face à une menace difficilement évitable. C'est du survival à priori simple, mais très bien traité.


Le réalisateur Yeon Sang-ho filme l'ensemble avec une certaine maîtrise. Si un petit lot de scènes versent un peu dans le m'as-tu-vu, globalement la réalisation est de bonne facture et le réalisateur exploite son contexte de belle manière. Dans le train, le côté huis clos se fait bien ressentir. On sent que la menace pourrait surgir à tout bout de champ, on se rend compte avec les personnages que des zombies affamés sont dans le wagon à côté et le malaise est assez omniprésent. Ce qui permet à Yeon Sang-ho de prendre en haleine le spectateur lors des attaques de zombies (la première vague est juste incroyable en terme de sensation éprouvée) sans tomber dans la surenchère de mauvaise série B. Le film nous permet également quelques passages se situant en dehors du train plutôt bienvenus pour éviter la lassitude.


Un des tours de force de Dernier train pour Busan c'est également de proposer dans sa démarche un point de vue très intéressant de la situation, et de notre comportement face à ce genre de menace. Car c'est vrai, que ferions-nous dans ce genre de situation ? Le personnage principal lui-même suit une bonne évolution dans ce sujet. Au début il pense surtout à son sort et à celui de sa fille. Il lui dit même qu'il vaut mieux d'abord penser à soi. Mais au fil des événements, le personnage évolue et constate que se serrer les coudes avec les autres est la meilleure option.


Les autres passagers sont eux-mêmes tiraillés entre l'égoïsme et l'aide à autrui. Quand le méchant, égoïste de première, finit par manipuler la masse, ils se retournent contre ceux qu'ils estiment infectés et les chassent du wagon, en plus de les enfermer. Il est intéressant de voir la population du train suivre cette voie, on peut très bien imaginer que c'est la panique qui pousse les gens à ce genre de comportement, au point qu'ils en deviennent facilement influençables.


Et cet égoïsme leur coûtera cher, puisqu'une dame dans le train préférera être emportée par les zombies et emporter avec elle le reste des passagers plutôt que de vivre au milieu des gens égoïstes qui ont visiblement choisi la mauvaise option. Pour elle, le comportement des passagers est tout aussi animal que celui des zombies, et elle ne veut pas le supporter, préférant se sacrifier ainsi que, dans un sens, punir les passagers pour leur mauvaise action.


Le méchant survivra à cette vague et continuera à effectuer les pires bassesses pour rester en vie, n'hésitant pas à jeter aux zombies des gens innocents ou à laisser tomber le chauffeur du train qui a pourtant pris la peine de venir le secourir. La définition même de l'égoïste en somme. Il finira par se faire mordre à son tour, mais sa mutation s'effectuera plus lentement que pour les autres, en guise de punition pour ses bassesses. Il se retrouvera donc à supplier les gens qu'il n'a pourtant pas hésité à trahir de l'aider, alors que l'infection commence à le gagner.


Dernier train pour Busan joue de ses personnages et de son fond à priori simple pour nous livrer un sacré spectacle gorgé de tension et non dénué de talent. Yeon Sang-ho ne cherche pas à faire dans l'original, et ce n'est pas plus mal puisque l'ensemble fonctionne tel qu'il est, avec ses scènes d'attaques de zombies remarquablement dirigées et efficaces, et son côté captivant de bout en bout. Impressionnant et intelligent.

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le 10 nov. 2016

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Nick_Cortex

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