Dersou Ouzala par Nicolas Montagne
Certains films ont une place à part dans la filmographie d'un réalisateur. Dersou Ouzala est de ceux-là pour Akira Kurosawa. L'oeuvre de la maturité pour un cinéaste qui avait déjà fait preuve d'une lucidité impressionnante tout au long de sa carrière. Auréolé de son oscar du meilleur film, il n'est autre que le compte rendu d'un cinéaste sur sa vie et sur son temps. Proche d'un Bergman ou d'un Tarkowski pour le coup, il est certainement l'un des meilleurs films de Kurosawa.
En plus de montrer une nature à la fois incroyablement belle et déraisonnablement hostile, Kurosawa dépeint les relations amicales entre un capitaine russe chargé de la cartographie d'une région reculée de son pays et un vieil ermite mongol seul au monde. Ou comment deux personnes que tout sépare peuvent finalement tisser des liens d'une force incroyable face à l'adversité qu'offre la nature. Cette dernière annonçant les événements de la Première Guerre Mondiale, on ne peut qu'être ému devant les efforts faits par le cinéaste pour l'illustrer.
C'est aussi un film sensoriel, un film que l'on vit, à la manière justement d'un Tarkowski. Une ode à cette nature pourtant si véhémente. Les plans longs rendent le film à la fois contemplatif et vivant (bizarrement), à l'image de cette scène de tempête dans ce paysage plat se prolongeant désespérément jusqu'à l'horizon.
A coup sûr, ce film restera un de ceux que l'on citera encore longtemps en premier en parlant de l'excellence du cinéma japonais,au même titre que Rashomon, Les Contes de la Lune vague après la pluie ou l'Empire des Sens.