Tintin et Milou chassent le Mexicain

Le périlleux voyage des mangeurs de tacos vers le Rêve Américain n'est pas un sujet nouveau au cinéma. Il y a eu du bon et du moins bon. Personnellement, je conseille fortement "La jaula de oro" (Rêves d'or) sur le sujet, un film brut et sans concession sur une réalité sordide. Ou comment relativiser du fin fond de notre canapé.

Dans la famille Cuaron, je demande le fiston : Jonas. A l'heure où Donald Trompe accentue sa croisade à coups de murailles de 15m de haut, la "border patrol" tente d'enrayer le flot continu de mexicains. Mais nos chers sheriffs ne sont pas seuls, de courageux Américains sans étoiles les épaulent quotidiennement, tout simplement parce que "That's my home". A ce propos, sautez sur le géniallissime documentaire "Cartel Land", de Matthew Heineman, sorti cette année, qui traite à la fois aussi bien des milices mexicaines luttant contre les narcos que des milices US qui traquent les immigrés à la frontière. Jojo Cuaron avait donc trouvé son thème de film : des immigrés traqués par un milicien un peu taré, dans une version disons "romancée".

Je soupçonne fortement Jojo de s'être inspiré de Wolf Creek 2, ce bijou du survival australien. Les liens entre les deux films sautent aux yeux. Échangeons les touristes allemands en balade de santé dans le bush australien par des immigrés mexicains passant la frontières des States et le tour est joué. Au programme, un alcoolique de milicien souhaite défendre son territoire de l'invasion mexicaine. Pour cela, il fait appelle à deux jokers, deux bons vieux potes qui ne le quittent pas: Tracker, son berger allemand, et son fusil de chasse.

Malheureusement, le survival est raté parce que le bad guy est raté. Puis le montage aussi. M'enfin, il est où le posage d'ambiance ? ça zigouille du Mexicain à tire-larigot, l'idée est bonne, mais tout ça est bien trop vite expédié. Il y a un tel décalage entre le carnage du début et la personnalité du Redneck. A aucun moment il n'inspire la crainte ou le dégoût, c'est triste. Si on continue le parallèle avec Wolf Creek 2, avec un seul plan on a compris à quel point le tueur est un malade, je tremblais dans mon canapé comme un mouton la veille de l'Aïd. Alors que là, le tueur a beau avoir un faux air de Javier Bardem, il n'est point fun. Aucune punchline de fou furieux, pas de sadisme, nada. Limite, on pourrait croire que c'est un type bien.

Une bonne moitié du film est décevante, ne sachant pas mettre en place une ambiance. Un truc con qui m'a fait rire au lieu de gémir, c'est lorsque le clébard attaque ses proies, il agite sa queue tranquilou bilou. Non, mais recadre-moi ça Jojo ! Ce n'est pas crédible pour un sou, il fait pas peur ton caniche. Le film est frustrant parce qu'il y a de bonnes idées, mais qui sont noyées dans un tas de ratés. Le coup des cactus par exemple : le perso qu'interprète Garcia Bernal, poursuivi par Tracker, plonge dans la "forêt de cactus". Aie, ouille, il a mal, normal. La tension monte, le chien est à ses trousses. Une scène stressante qui verra enfin une victoire côté Mexicains. Mais notre Gael s'en sort NI-CKEL. Pas de blessure, pas de vêtement déchiré alors qu'il a rampé sur 30m de lames de rasoirs. Une veste comme neuve, à l'image du film, c'est-à-dire trop lisse. Il a manqué de la sueur, de la poussière, de la surprise aussi. De la surprise parce que le film entier est prévisible, jusqu'à la dernière scène.

Plaisir gâché.