El Mariachi, premier film de Rodriguez, avait pour lui en dépit d’un scénario simpliste une naïveté dont la fraîcheur éclipsait un budget sous forme de revenu annuel hindou, et un concept de personnage ma foi fort plaisant. Moi qui taquine humblement le manche, un guitariste pistolero qui trimballe du plomb dans un flight case un mégot au coin du bec, ben ça me parle.

Ici on a bien compris que l’ami Bob, fort de mille fois plus de billets verts, avait bien envie de se la raconter, sacrifiant son récit à une coolitude de comptoir en plus de 90% de son charme, pas mal de rythme, et la majorité du casting d’origine.

Si on ne peut nier que Banderas a plus de gueule dans son complet noir que Carlos Gallardo et que Hayek donne plus envie de manger mexicain que Consuelo Gomez, on regrette assez vite de ne pas retrouver Peter Marquardt, tête de connard de circonstance et sorte de sosie hispanophile de Robert Patrick sur El Mariachi, en lieu et place de ce tacos sans épice de Joaquim de Almeida.

On est tout de même content de voir la famille : Cheech Marin et mon Trejo d’amour en tête ; en plus Buscemi nous offre une sympathique scène d’intro avant d’aller cachetonner ailleurs, et le podophile de service passe par là nous raconter une blaguounette avec toute la verve qu’on lui connaît. Pis on croise des tronches déjà vues sur El Mariachi.

Et j’avoue que j’ai du mal à résister à cette atmosphère de hijo de puta : sueur, cerveza, cordes en nylon, et bastos.

Caramba.

A part ça Rodriguez oscille entre indolence toute mexicaine qui fait son petit effet, et nonchalance soporifique faute de savoir tenir un rythme plus d’une ou deux fois dans le film et d’abuser de ralentis de frimeur aussi dispensables, que redondants, que boursouflés, que chiants en fait. Du coup tout le petit travail d’ambiance western urbain mexicain tequila qui suinte se retrouve sapé par une gestion de la mise en scène et de ses accessoires —là je pense à la musique— complètement dégoulinante.

Tout ça m’évoque un de ses mélanges tequila bière dilué dans un litre d’eau renversé qu’on laisserait couler sur son pantalon sans broncher.

Voilà ce que ça donne quand un film mexicain se retrouve financé par des américains pour ressembler à ce que les américains disent à quoi doit ressembler un film mexicain.

Les ravages de la mondialisation…

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le 22 janv. 2013

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real_folk_blues

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