Les frères Dardenne ne nous livrent pas un chef d’oeuvre avec Deux jours une nuit, mais il n’en est pas moins intéressant grâce au thème qu’il traite. De par le jeu toujours excellent de Marion Cotillard, que l’on retrouve dans ici dans le rôle d’une femme un peu perdue, fragile voire dépressive, elle emmène le film dans sa direction et c’est elle même qui le porte sur ses épaules comme tous les problèmes que le personnage porte dans l’histoire. Sandra dans le film, a peu de temps pour convaincre ses collègues de renoncer à leur prime pour sauver son emploi. Et cette histoire va se répéter du début à la fin du film faisant de lui, quelque chose de plutôt lassant et répétitif. Les premières minutes contiennent l’intégralité du film, ou presque, puisqu’allant de porte à porte pour voir ses collègues, les mêmes phrases se répètent, les mêmes émotions, expressions. L’avancée est plate et il faut attendre la fin pour arriver au dénouement de l’intrigue, qui sauve la lenteur du contenu. Heureusement, certaines scènes réveillent le spectateur et font du bien : quand elle crie lors d’une dispute ou lorsqu’elle monte le son de la radio dans la voiture. Mais le rythme trouvé redescend aussitôt pour retomber dans l’enchaînement redondant. Marion Cotillard n’est pas déméritante pour tenir bon tout le film bien que très loin de la force qu’elle mettait dans De rouille et d’os où elle parvenait à mieux interpréter cette femme souffrante.


Du point de vue de la réalisation, il n’y a pas un très gros travail des frères Dardenne mais les plans sont centrés sur les émotions de Sandra. La succession des plans-séquences nous entraînent dans le périple avec Sandra mais finit par nous laisser car rien d’exceptionnel n’est mis en scène par les deux frères. C’est madame tout le monde qui nous est présentée et de cette manière, le spectateur peut facilement s’identifier au personnage et ressentir sa douleur. On vit l’intrigue avec elle.


Le thème traité est un très bon sujet mais il mériterait d’être raconté avec plus de haine, plus de force. C’est une lutte ici que l’on regarde, et la rage n’est malheureusement pas assez présente bien que le courage est largement illustré par cette femme qui se bat jusqu’à la fin pour sauver son travail. Au delà de l’intensité manquante dans beaucoup de scènes, peut être aurait-il été judicieux de se détacher du chemin de ce porte à porte incessant et d’aller vers quelques scènes de famille ayant pu nous toucher d’avantage. De plus, la description de l’entreprise est trompeuse et pas très réaliste ; le vote est organisé comme si la décision n’était pas importante. Le cadre de l’entreprise est limité alors que pour une représentation d’une réalité sociale comme ici, il aurait été judicieux de réellement s’attacher à ce climat.


Deux jours, une nuit manque ainsi de certains détails et de rythme qui rendent le flm ennuyeux sur la majorité du temps de la projection. Le sujet est pertinent et très intéressant à étudier mais mal exploité par les frères Dardenne. Au delà de l’illustration de la crise, le film montre l’esprit de solidarité qui n’est pas encore totalement mort et le courage d’une femme désarmée de se battre encore pour elle et sa famille, interprétée par Marion Cotillard avec talent.

gwennaelle_m
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le 30 mars 2015

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