Il faut sauver le soldat De Niro

Autant prévenir tout de suite, Dirty Grandpa n'est pas une comédie familiale contrairement à ce que l'on peut penser. Dan Mazer, connu comme étant le scénariste de Borat et d'Ali G, réalise ici son deuxième long-métrage après Mariage à l'anglaise. Et il faut dire qu'il aurait dû s'abstenir. Niveau casting, on retrouve Zac Efron, duquel on n'attend pas grand chose même si son rôle dans Paperboy était saisissant, Robert De Niro qui s'est définitivement égaré, et Jason Mantzoukas, connu pour son rôle dans The dictator qui était très drôle mais déjà très lourd et lassant. On notera le passage anecdotique de Danny Glover en grand-père mourant. Ce n'était pourtant pas mal parti pour développer une bonne comédie made in USA, mais Dirty Papy s'avère être dans le top 5 des plus mauvais films de ce début d'année 2016. Un flop monumental couvert par l'irrévérencieuse réussite commerciale des Tuche 2.

Comme cité plus haut, Robert De Niro semble inéluctablement perdu dans ses petits rôles de faire-valoir. Son dernier grand rôle remonte pour moi à 1995 dans Heat et Casino, avec un certain Martin Scorsese. Depuis que Léonardo Di Caprio est devenu la nouvelle coqueluche de Scorsese, Robert De Niro s'en tient à des rôles affligeants de vieux pervers-pépère comme ici, où de papy coléreux comme dans Happiness Therapy. Quand on réussit à apercevoir son regard entre deux plans de trois secondes, on voit bien toute la détresse et l'ennui de l'acteur, comme s'il nous envoyait un message qui insinue que ses meilleurs instants de cinéma sont bien derrière lui. L'aspect mercantile de son implication n'est pas à négliger non plus et serait insignifiant si en parallèle de cette production il s'investissait sur un quelconque autre tableau...

Revenons-en à l'essentiel pour ce navet. Ce qui fait que le film est foncièrement mauvais, c'est sa vulgarité. L'humour n'est pas humour quand il est grossier et lourd comme ici. A titre de comparaison, imaginez un spectacle de Bigard mélangé à Very bad trip et vous obtenez Dirty Papy. Tous les personnages sont libidineux, même les filles, quasiment toutes à poil sur la plage en train de picoler. A l'instar de Very bad trip, les deux flics du film sont comme par hasard, deux gamins compréhensifs, généreux et débiles qui laissent un dealer de mét', de crack et de weed repartir avec sa drogue dans la poche. Faut-il rappeler que les scènes se déroulent aux Etats-Unis d'Amérique, ce pays où pour un excès de vitesse ou un abus d'alcool, on vous enferme pendant 24 heures voire plus. Fait invraisemblable et d'une niaiserie sans nom, le discours de mariage d'un protagoniste dépressif qui se termine par une accablante remarque sur Daesh, sévèrement inopportun et abstrus. Pour ce qui est du scénario, son contenu est prosaïque. Un grand-père perd sa femme, son petit fils part avec lui en Floride pour apprendre à le connaître davantage. Le calme plat sur les mers de la maîtrise scénaristique, le capitaine Audiard n'a qu'à bien se tenir !

Donc pour résumer, Dirty Papy n'est qu'un ensemble de blagues pipi-caca bien lourdes et gênantes. Un contenu insipide et dérisoire, avec un scénario écrit par une petite fille de 6 ans. On se demande vraiment si Dan Mazer vit bien dans le même monde que nous. On obtient au final une comédie qui se veut outrancière et politiquement incorrecte, mais on ne peut prétendre à ce titre qu'avec des gros plans de pénis et des "I want to fuck, fuck, fuck" à foison. C'est juste de très mauvais goût. L'acteur De Niro qui a marqué nos esprits fétichistes de cinéphiles n'est plus. Prions pour que le projet de Martin Scorsese (The Irishman) avec De Niro, Al Pacino et Joe Pesci voit le jour, pour lui donner ne serait-ce qu'un seul bon rôle avant que l'immense comédien ne s'éteigne. En attendant, l'étoile du cinéma américain des années 1980-1990 ne brille plus et sa lumière qui jadis resplendissait semble de moins en moins perceptible...