Divines fait partie des films qui marquent, ce genre de films dans lequel on ne sait plus sur quelle émotion danser. Le genre de film dont je sors bouleversée et tellement immergée dans l’action que j’avais l’impression de marcher au milieu de leur cité en allant prendre le métro. Divines fait partie des films dont on retient les répliques amusantes que je laisse découvrir à ceux qui ne l’ont pas vu.


Divines sont les actrices qui prennent le rôle de deux filles nées et ayant grandi dans une cité voire une bidonville. Le film raconte la vie de Dounia, ambitieuse et assoiffée par l’argent et la gloire. La seule chose dont elle rêve c’est d’avoir de la « Money money money » comme elle dit si bien. Toujours accompagnée de Maimouna, elles commencent à dealer ensemble pour imiter la grande du quartier de qui elles reçoivent les ordres, Rebecca interprétée par Jisca Kalvanda. Sous ses airs de grande dure, Dounia fait preuve de grande sensibilité et de douceur. Elle ne supporte pas qu’on s’en prenne à sa mère et elle ferait tout pour sa meilleure amie ; elles se rendent souvent ensemble dans une salle de danse pour observer les auditions d’un futur spectacle. Et si on ne s’attend pas à quelque chose au début du film, c’est bien à ce que la jeune fille flanche pour un artiste. Entre affaires de drogues et d'argent, bagarres, et sensualité et douceur, il est difficile de tout mêler pour l’héroïne qui va bien souvent se brûler les ailes.


Elle nous emmène avec elle dans ses plans foireux, au même titre que Maimouna qui bien qu’un peu plus apeurée, ne la laisse jamais tomber. Et on donnerait bien tout à cette fille pour la voir sourire tout le long du film et qu’elle arrête de foncer tout droit dans ces bêtises. Autant son humour, sa carapace que sa fragilité nous charment tout de suite. Oulaya Amamra incarne brillamment le personnage, si bien que j’ai eu envie de rentrer dans l’écran à plusieurs reprises pour aller la défendre tant je l’ai trouvée attachante. Le jeu de la jeune actrice ne connaît aucune faille. Elle excelle dans les scènes de vie, de joie comme lorsqu’elles font semblant de conduire une ferrari, scène digne d’une très belle pièce de théâtre. Et elle sait toucher et convaincre dans les scènes plus graves où la violence mène la danse, et les cris se font entendre. Déborah Lukumuena ne démérite pas non plus, elle réussit à rentrer dans le personnage de Maimouna dès les premières scènes où l’on cerne assez vite les différences de caractères entre les deux acolytes. Le trio d’actrices est efficace et essentiel ; c’est agréable de découvrir des jeunes talents à un tel niveau.


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La caméra de Houda Benyamina est aussi grandiose que les actrices, les plans souvent sombres dûs à l’ambiance du film rendent si bien à l’écran qu’ils plongent le spectateur dans le décor et dans cette atmosphère du début à la fin. On vit totalement toute l’intrigue en apnée, bon on respire de temps à temps grâce à quelques blagues parce qu’1h45 ce serait un peu long. Mais les plans de nuit sont beaux, ce cinéma est simple et c’est ce qu’on aime. La réalisatrice ne s’embête pas avec des détails inutiles, les acteurs prennent toute la place. La première scène de danse entre Dounia et le danseur est pour moi l’une des plus belles du film car c’est celle qui nous offre tout. Les lumières sont belles parce que seuls les projecteurs éclairent les deux personnages et cette sobriété semble pourtant belle et bien réfléchie. La chaleur de la lumière et la beauté de leurs gestes mêlent la violence, la douceur et la sensualité comme je l’ai rarement vu à l’écran. L’alternance entre l’obscurité de la vie dans les quartiers et la poésie des scènes de danse nous oblige à vasciller entre plusieurs émotions, au même titre que Dounia.


La vie difficile et le destin incertain des jeunes des quartiers tout comme la délinquance sont des thèmes abordés de nombreuses fois au cinéma. En choisissant ce sujet pour son premier long métrage, Houda Benyamina savait qu’elle n’avait pas d’autres choix que d’apporter quelque chose d’original au thème et elle n’y a pas manqué. Film majoritairement politique, les touches de grâce et de poésie amènent la finesse nécessaire pour réussir et marquer les esprits.


Je crains que mes mots soient un peu fades face aux émotions que Divines m’a fait ressentir mais ce qui est sur c’est que si Cannes étaient à elles, j’espère que le théâtre du Châtelet et bien d’autres choses leur appartiendront aussi parce que moi je leur donne tout et surtout mon admiration.

gwennaelle_m
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le 17 sept. 2016

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