Divines divise, mais c'est toujours plus intéressant qu'un présupposé consensus ; alors que le bouillonnement de sa réalisatrice donnait le ton d'un film sur la banlieue, la Caméra d'Or met à l'honneur la volonté d'Houda Benyamina de trouver sa voie, quand bien même certaines maladresses.
Si le scénario reste dans la lignée du film de banlieue, les clichés restant ancrés, on est pas moins cueillit par la réalisation. Enfermant ses personnages dans le béton tout en tentant de les élever vers le ciel, la réalisatrice parle de la banlieue par le prisme de l'amitié. Les deux actrices, assez opposées dans leur jeu, offrent une performance qui convainc ; autant dans la version très expressive de l'une (Oulaya Amamra) que dans la forme plus effacée de l'autre (Déborah Lukumuena) pourtant dans un rôle aux accents comiques.
Les rêves d'argent qui jalonnent leur vie inscrit ces filles des banlieues dans un déterminisme bien réel malgré les revendications de la réalisatrice. S'en sortir n'est pas qu'une question de volonté et de choix quand la pauvreté a régit toute votre vie. Même si on ressent une certaine forme de karma tout au long du scénario. La vision très féministe du film n'aide pas l'histoire romantique à être crédible même si on apprécie l'effort d'instaurer une forme d'art dans la violence de la banlieue. Le personnage de Djigui donnant autant une bouffée d'air frais à Dounia, qu'une épine dans sa trajectoire.
Pourtant on se laisse porter par cette envie de nous montrer autre chose, les scènes de danse se détachant du reste de l'histoire.
Aussi facile qu'il est d'utiliser de la musique classique (rarement acquise à ce genre de film) elle n'en reste pas moins astucieuse dans l’utilisation du pathos. Cela peut déranger, la ficelle larmoyante se voit gros comme une maison, mais pourtant cela fonctionne. Si le but est d'attirer le spectateur dans cet état de sidération et que cela marche alors pourquoi pas ; mais il ne faut pas non plus oublier la dimension sacrée que cette musique apporte à la volonté de divinité que la réalisatrice apporte à ses personnages prisonnières du béton. La fin viendra d'ailleurs sonner le glas de l'optimisme qu'on serait en droit d'attendre pour mieux cueillir le spectateur, ou pas. Moi je suis conquise par le procédé.

LuluCiné
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le 17 sept. 2016

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