Divines, ou le syndrome film sur la banlieue qui te colle au corps. Pire. Ça commence par un clash prof élève, comme sur un film sur la banlieue, (cliché absolu), tellement usé que ça ne fait plus rien de le voir. Heureusement, il y a Oulaya Amamra/Dounia, qui se donne corps et âme. Et son talent est de rendre intéressante cette petite fille perdue dans un ghetto de banlieue. Sans elle, la vie de cette fille n’aurait pas été aussi intéressante. Oulaya joue bien, mais en fait beaucoup trop. En surrégime tout le temps. Elle fatigue jamais cette fille ? Sa copine, Deborah Lukumuena/Maimouna, en comparaison, est beaucoup plus sobre, et  m’a touchée encore plus. Petit parcours du combattant entre la mosquée, et le supermarché. Ici, c’est le supermarché qui gagne. Et ça commence par un vol dans le supermarché.


Les ambitions du film ne sont pas gigantesques. Un minimum de savoir-faire, des acteurs amateurs pour pas mal d’entre eux, quelques portes ouvertes sur l’imaginaire. Le film est sauvé du brouillon dans lequel il aurait pût sombrer.


On n’a pas un film sur l’ascension d’une rebelle, contrairement à ce qu’on veut faire croire. Dounia n’est pas ambitieuse, et n’a pas la soif du pouvoir. On ne décolle pas du terrain vague d’en face, et du ghetto local, qui n’a de ghetto que le nom, et quelques stigmates. La misère est annexe. L’argent un besoin, pas un but. Pas de visée sociologique à la Sorbonne machin. La visée est agissante, comme cette danse autour du même pôle. La parole est absente, ou caricaturée. La religion, c’est seulement dans le décor, derrière. Aucune stigmatisation en vue. De quoi est-il question ?


Je vois un vidéoclip, fiction, à l’américaine, comme on en voit beaucoup, c’est le style international. Bain de sensation. Action. Même quand il y a de la poésie, quand les deux sœurs de cœur s’envolent au volant de leur Ferrari imaginaire, on reste cloué au sol. C’est un vidéoclip, au rythme soutenu, sans temps morts, sans arrière pensées. Immersion. En boîte. Avec le tube Hip Hop du moment. Rien de neuf sous le soleil. Côté enjeux, ça tombe à plat. Maîtrisé, mais avec crapauds, pas abouti.


C’est côté formel qu’on a quelques bulles d’oxygène. La « méchante », Rebecca, la grande sœur, chef de gang, femelle à poigne. Elle est excellente. J’ai adoré. Et le beau mâle de service, qui fait tourner la tête aux filles, Djigui. Pour le remercier, elles lui crachent dessus !


 Lui, parle par la danse. Elles, elles crachent. C’est les moments les plus intéressants du film. Ce vigile, qui fait vigile, mais rêve de passer l’audition pour être danseur. Et ces deux filles qui rêvent en voyant ce mâle passer. Beaucoup d’indices montrent qu’en dessous, on nous montre la naissance au désir des filles. Film ou les filles sont habillés sport, couvertes de la tête aux pieds, les gars n’ont pas peur de montrer leurs atouts physiques. Et elles qui font la tête de la louve de Tex Avery ! À chaque fois ! Mais se sont de jeunes louves inexpérimentées, qui se font manipuler par Déborah, la caïd du coin. Elles font le guet, passent la marchandise. La routine.


Dounia passe sont temps libre à regarder son danseur, à le filmer avec son portable. Les plans de répétitions des danseurs, sont des moments de totale respiration, bienvenue. Elle mate des loges. La danse par manque des mots ? Elle reste sans voix. Quand on se parle, c’est des insultes. La confrontation est toujours physique. Pourquoi ne pas se taire, et danser ? C’est ce que dit Djigui, le danseur, à Dounia. Et Dounia, qui a une grande gueule, et peur de personne, ne semble pas comprendre. Par contre, elle pique du rouge à lèvres dans le Carrefo*r du coin... La montée du désir dans les creux des reins des filles. Le garçon manqué qui met du rouge à lèvres ? « T’es entrain de devenir femme, pauvre conne ! » C’est ce qu’on a envie de lui dire. De nombreuses scènes de transitions ne montrent que cela. La montée du désir chez les jeunes filles dans la  ZEP du coin.


 J’ai dis pauvre conne, (c’était malvenu, pardon), mais je l’aime bien. Le mélo déguisé en vidéoclip, qui finit en drame tout court. Absurde et comique, mais s’ explique bien. L’incommunication jusqu’au bout. Le film de banlieue, finit en drame urbain. Quiproquo fatal. Fin des haricots. Pas parfait, mais quelques belles fulgurances quand même. Deux belles actrices. Et une nouvelle divinité à adorer. Voici, Oulaya Amamra.

Angie_Eklespri
7
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le 10 oct. 2017

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Angie_Eklespri

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