Sous ses airs de blockbuster calibré pour attirer les fans des sagas Harry Potter et X-Men, compte tenu de deux têtes d’affiche, Victor Frankenstein propose une déclinaison originale au roman épistolaire de Mary Shelley, qui délaisse la créature pour s’intéresser au créateur et à sa relation amicale et fraternelle avec celui qu’il a sauvé. Aussi le combat scientifique pour donner la vie apparaît-il peu à peu comme l’aliénation d’un être soucieux de se faire un nom à soi, de quitter l’ombre paternelle et de remédier à sa propre mortalité et aux angoisses qu’elle provoque. Victor trouve en Igor sa création véritable : en le tirant du cirque dans lequel il croupissait durant dix-huit années, en remédiant à sa difformité – ce qui donne lieu à une scène tout à la fois douloureuse et jubilatoire –, en le recueillant chez lui pour lui offrir un toit, une protection et un statut, il confère à cet anonyme un nom et une identité. Igor devient alors une allégorie de l’amitié, dont les pouvoirs équivalent celles du Créateur en ce qu’elle ranime ce qui décrépissait ou semblait mort.
Les deux acteurs principaux, Daniel Radcliffe et James McAvoy, s’amusent comme des petits fous et forment un duo réussi et attachant, au sein d’une production rythmée et assez bien mise en scène qui a l’intelligence de réinsérer la science du XIXe siècle dans un climat général d’expérimentation et de foire. La partition musicale de Craig Armstrong achève de faire de Victor Frankenstein une excellente surprise.